mercredi 24 avril 2013

"Non violente", la Manif pour Tous?


C'est devenu un de ses Leitmotiv, au même titre que "Un papa! Une maman!": la Manif pour Tous serait "non violente":

"Ce qui me semble être la force de notre mouvement, c'est la non-violence intérieure. C'est celle qu'exprime désormais dans la rue le mouvement naissant des "veilleurs". Le pouvoir utilise désormais comme élément de langage pour nous décrire les mots de "violence" et de "haine" qui sont aux antipodes de ce que nous vivons comme fraternisation derrière nos banderoles." (Le Monde, "Manif pour tous" : "Nous avons été traités comme des sous-citoyens", entretien avec Tugdual Derville).
Il s'agit notamment de se dissocier de l'activisme de mouvements tels que le GUD, et d'éviter que les plus jeunes manifestants se laissent séduire par la tentation de l'illégalité, via des initiatives "spontanées" telles que le Printemps Français. D'où ce nouveau phénomène, celui des veilleurs, qui insiste sur la vigilance pacifique et n'hésite pas à invoquer la figure de Gandhi.

La Manif pour tous est-elle violente? Pour répondre à cette question, rappelons tout d'abord les significations du mot "violence". Selon Wikipédia:

"La violence est l’utilisation de force physique ou psychologique pour contraindre, dominer, causer des dommages ou la mort. Elle implique des coups, des blessures, de la souffrance.
Pour la philosophe Blandine Kriegel, la violence est « la force déréglée qui porte atteinte à l’intégrité physique ou psychique pour mettre en cause dans un but de domination ou de destruction de l’humanité de l’individu. » La violence est ainsi souvent opposée à un usage contrôlé, légitime et mesuré de la force."
Parmi les nombreux exemples donnés, on trouve bien sûr la violence politique, que la Manif pour Tous réfute:

"Violence politique : la violence politique regroupe tous les actes violents que leurs auteurs légitiment au nom d'un objectif politique (révolution, résistance à l'oppression, droit à l'insurrection, tyrannicide, « juste cause »).
 Certaines formes de réponses violentes mais proportionnées (et de résistance ou servant le rétablissement de l' état de droit), quand d'autres solutions ne sont plus possibles sont couramment admise, par la morale et le droit et selon la doctrine des droits de l'homme ; en cas de légitime défense par exemple, ou d'état de nécessité, en cas de résistance à l'oppression d'une tyrannie.
Et la violence entre personnes, qu'elle attribue à des éléments isolés:

"Violence entre personnes : comportements de domination ou asservissement employant la force, physique (coups, viol, torture…), verbale et psychologiques (injures, injonctions paradoxales, harcèlement, privation de droits ou liberté, abus de position dominante…) ; Ces comportements peuvent être conscients ou non. Cette catégorie inclut la violence entre partenaires ou de parent à enfant, et différentes formes d'embrigadement ;
Mais également la violence symbolique:

"Violence symbolique : c'est notamment la thèse de Pierre Bourdieu, qui désigne plusieurs sortes de violences : verbale (éventuelle première étape avant passage à l'acte) ; ou invisible, institutionnelle : c'est aussi la violence structurelle (Galtung) face à laquelle les individus semblent impuissants. Celle-ci désigne plusieurs phénomènes différents qui favorisent la domination d'un groupe sur un autre et la stigmatisation de populations, stigmatisation pouvant aller jusqu'à la création d'un bouc émissaire.
La violence est donc protéiforme, et peut être physique ou psychologique, individuelle ou collective, visible ou invisible, volontaire ou structurelle. La Manif pour Tous s'est jusqu'alors surtout défendu sur les terrain des violences visibles et volontaires. Ce billet a pour objet principal de poser la question des violences invisibles et structurelles.

A quelle occasion ce mouvement est-il né? Des mobilisations, issues en grande partie, mais pas uniquement, de la droite catholique, contre un projet de loi visant à rendre possible le mariage pour les personnes de même sexe. Un projet qui vise à résorber l'inégalité structurelle, battue en brèche dans l'opinion mais encore bien présente dans les esprits, comme je le montrais dans un billet précédent, entre une majorité hétérosexuelle, et une minorité homosexuelle, qui, en France, n'a certes pas fait l'objet d'une condamantion par le droit pénal, à part sous le régime de Vichy, mais qui a été très longtemps été considérée comme une minorité malade, jusqu'au retrait en 1990 par l'OMS de l'homosexualité du registre des maladies, qui le demeure indubitablement dans la tête de beaucoup, et dont l'orientation sexuelle fait l'objet de sévères condamnations par plusieurs religions, dont les trois abrahamiques.

Se positionner par rapport au mariage pour les personnes de même sexe parait donc nécessairement interroger ce statut controversé de l'homosexualité, officiellement une orientation sexuelle minoritaire mais normale, mais encore considérée par beaucoup comme une maladie, une perversion, voire une faute. Comment refuser à des personnes homosexuelles un droit acquis pour celle hétérosexuelles, sans impliquer que l'on  considère que leur orientation sexuelle n'a pas la même légitimité?

Pourtant, les opposants au projet de loi, du moins dans ce qui apparait comme leur discours majoritaire, nient la pertinence d'une telle relation. Il ne s'agit pas de condamner les homosexuels, disent-ils, ni même de leur nier la possibilité de vivre une union sincère et heureuse, mais de s'interroger sur les bouleversements qu'un mariage gay entrainerait sur la filiation telle qu'elle a été conçue jusqu'ici, et partant, sur la croissance et l'épanouissement d'enfants accueillis au sein de tels couples, par voie, par exemple, d'adoption. Et impossible de dissocier le débat sur le mariage homosexuel et celui sur l'homoparentalité, disent-ils (à raison), car ceux-ci sont juridiquement liés. D'où les protestations de nombre de manifestants, face au soupçon d'"homophobie", qui protestent de leur bienveillance envers les homosexuels, et de leur soutien à des formes de reconnaissance et de protection juridiques de leur union, comme un contrat d'union civile élargie, qui leur permettrait de bénéficier d'un grand nombre des garanties apportées par le mariage sans pour autant que la question de la filiation soit posée ( à noter qu'un nombre encore important de catholiques, compris parmi ceux en principe modérés, y restent opposés, par peur de voir "banaliser" l'homosexualité). En gros, il n'ont rien contre la revendication des homosexuels de bénéficier de la même reconnaissance et des mêmes droits que la majorité hétérosexuelle, mais ils sont bien obligés de s'opposer à leur demande, puisque celle-ci n'est pas dissociable de la filiation et de l'homoparentalité.

Mais inversement, ces questions de la filiation et de l'homosexualité sont-elles dissociables du regard porté sur l'homosexualité? Aux yeux de beaucoup d'opposants, manifestement oui. On ne peut qu'être impressionné par les efforts que nombre d'entre eux ont fait pour écarter la question de l'homosexualité du devant de la scène. En mettant très en avant celle de l'enfant: en rendant possible l'homoparentalité, on créerait une forme de "droit à l'enfant", qui irait contre l'épanouissement de ce dernier, qui aurait besoin pour s'épanouir de la présence conjointe d'un homme et d'une femme (la fameuse "complémentarité des sexes" tant défendue par l'Eglise). Ils ont mis en avant le témoignage d'homosexuels contre le projet de loi, par la large diffusion de la pensée de Philippe Ariño, par la présence parmi les portes-paroles de la Manif pour tous de Xavier Bongibault, par la création du site Homovox, qui présente les témoignages d'homos mobilisés contre le projet de loi.

"Clement D : Vous sentez vous responsable de la montée d'homophobie en France ?
Certainement pas. Mais je me sens très concerné. Dans notre mouvement, la présence de ceux d'entre nous qui sont homosexuels donne, à l'inverse, de magnifiques expériences de partage. Entre porte-parole, nous avons échangé en profondeur sur le désir d'engendrement. Mais je dois dénoncer l'amalgame qui est désormais fait entre l'homophobie et l'opposition au projet de loi Taubira.
J'ai discuté sur France Culture, lundi 15 avril, avec la présidente de SOS-Homophobie, qui a clairement exprimé que non seulement, le seul fait de s'opposer au mariage entre personnes de même sexe assorti du droit d'adopter des enfants, était homophobe, mais que les personnes homosexuelles qui manifestent avec "Manif pour tous" sont également homophobes. J'invite les internautes à écouter les témoignages très courageux qui sont disponibles sur le site homovox.com, montrant bien qu'il ne s'agit surtout pas de dresser une catégorie de personnes contre une autre.
Je reste dans la ligne de lutte contre l'homophobie en ce qu'elle est haine, injure et discrimination injuste en raison de l'orientation sexuelle. Ce qui peut faire monter l'homophobie, c'est la mauvaise interprétation de notre engagement avec la peur que représente l'idée qu'il y aurait des millions de personnes dressées contre les droits des homosexuels."  (Le Monde, "Manif pour tous" : "Nous avons été traités comme des sous-citoyens", entretien avec Tugdual Derville).

En fait, je dois avouer que c'est cette initiative précise qui a commencé à me faire douter, il y a de nombreux mois, de la non homophobie tant revendiquée par les opposants. On présente des homosexuels qui sont contre ce nouveau droit qu'on leur propose. C'est très bien, leur parole est importante, comme toute parole, et doit être confrontée au discours qui apparait majoritaire parmi leur communauté. Cependant, à la lecture de certains de leurs témoignage, il m'a semblé que dans l'interprétation de ceux-ci, certaines questions cruciales devaient être posées, qui selon moi ne l'ont pas été.

Si je prends par exemple le témoignage de Philippe Ariño, je ne peux m'empêcher de poser de poser la question du rapport de son vécu aux normes, dites ou non dites, qui ont structuré son éducation. Nous avons un jeune homosexuel qui a été élevé dans une famille catholique très pratiquante, dont le frère est religieux, qui a vécu sa sexualité de manière tout d'abord très débridée, s'est un temps rapproché d'un groupe de chrétiens homosexuels (David et Jonathan) avant de très fortement s'en distancier, et qui a fini par choisir l'abstinence totale. C'est un très beau témoignage, et, moi-même hétérosexuel et pas forcément toujours rassuré sur la pureté de ma propre sexualité, j'aimerai avoir le courage de faire un choix d'une telle radicalité. Il n'empêche que compte tenu de la coexistence dans son histoire de deux influences contradictoires, celle de son éducation catholique qui porte en elle un jugement négatif sur l'homosexualité, considérée comme une "tendance objectivement désordonnée" et ses pulsions homosexuelles, on ne peut selon moi éviter de s'interroger sur la signification de son témoignage: les souffrances dont il témoigne sont-elles l'expression du "désordre" homosexuel, ou d'une culpabilité d'origine culturelle, une souffrance qui nait de la contradiction entre son éducation et son désir, qu'il tente de résoudre en l'attribuant à ce dernier seul?

Ainsi, il s'attache à mettre en évidence dans son Dictionnaire des codes homosexuels l'importance du viol dans la culture gay. Je ne puis m'empêcher de rapprocher cette analyse de la dénonciation opérée par les féministes de la "culture de viol" qui serait une structure de notre société occidentale contemporaine, et qui concernerait aussi bien les hétérosexuels que les homosexuels. Philippe Ariño a-t-il perçu une composante essentielle et spécifique de la sexualité gay, ou bien ce qu'il a annalysé comme la violence propre de cette dernière est-elle en fait celle de toute sexualité dans notre société, qu'il interprète au travers du prisme d'une culpabilité liée à son éducation?

Aussi le témoignage d'Audrey, sur le blog La théologie du corps, qui raconte un parcours quasi inverse de celui de beaucoup d'homosexuels: une personne qui ne s'accomplit pas dans les rencontres avec des personnes de même sexe, mais qui rencontre un amour vrai avec quelqu'un du sexe opposé: vérité sur l'homosexualité, ou difficulté d'une sexualité particulière, avec son histoire et ses influences propres? Que dire de sa pratique régulière de la psychanalyse, aujourd'hui très contestée, et dont les grands représentants (Lacan par exemple: voir la relecture qu'en fait Judith Butler dans le deuxième chapitre de Trouble dans le Genre) ont parfois eu des interprétations très extrêmes et contestables du désir homosexuel?

Cela n'ôte pas toute valeur à ces témoignages, et ce n'est pas leur contenu en lui-même qui est gênant. Non, ce qui l'est, c'est la manière dont ils sont mis en avant pour annuler les revendications LGBT, comme si la seule parole homosexuelle légitime, digne d'être écoutée, était celle qui célébrait le désir hétérosexuel, comme si les homosexuels ne pouvaient constituer une altérité véritable, aporter une vérité autre que la nôtre, et qui pourrait enrichir notre compréhension du désir sexuel et de l'amour, mais ne pouvaient, au mieux, que confirmer notre propre désir. Il est bien sûr compréhensible que des catholiques, par exemple, tendent à privilégier un discours qui va dans leur sens. C'est humain, tout le monde fait ça. Mais ce qui dérange, c'est l'enthousiasme avec lequel ils le font. Un homosexuel publie des livre où il explique la spécificité du désir homosexuel par la fascination du viol, et ses livres se vendent comme des petits pains, il est convié à des témoignages quotidiennement, on loue son homosexualité. Bizarrement, je peine à constater une même appétence pour les publications décrivant la "culture de viol" en milieu hétérosexuel.

On laisse des homosexuels se culpabiliser et culpabiliser leur communauté, sans s'émouvoir, sans s'interroger, en condamnant l'ensemble (pas nécessairement dans la totalité de leur personne, mais du moins dans leur désir qui en est une part constitutive importante) du fait du témoignage de quelques uns, à rebours du geste christique de rédemption de la multitude par le sacrifice d'un seul. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y ait aucune vérité ni aucune beauté dans les choix de ces homosexuels atypiques. Mais j'ai du mal à prendre cet enthousiame pour des parcours qui condamnent le désir homosexuel en tant que tel comme " de magnifiques expériences de partage", pour reprendre la formule de Tugdual Derville, dans la mesure où précisément il semble qu'il n'y a pas partage, mais simple confortation par les représentants d'une minorité de la légitimité du pouvoir de fait d'une majorité. Le témoignage homosexuel n'est pas accueilli comme une plus value du désir homosexuel par rapport à celui hétérosexuel. La vie intérieur de l'homosexuel n'est pas vue comme une source intrinsèque d'enrichissement, ce qui rendrait possible un vrai partage,  mais comme une validation de la supériorité intangible et non contestable de celui hétérosexuel.

De même, on prétend séparer la question de la filiation de celle de l'homosexualité, et pouvoir prendre position sur la première sans condamner la seconde. Mais dire que l'enfant a besoin de la complémentarité d'un père et d'une mère pour s'épanouir, c'est dire que la relation hétérosexuelle est plus naturelle que celle homosexuelle, qu'il manque quelque chose à cette dernière pour permettre d'établir un cadre familial sain. Loin d'être une évidence intangible, cette complémentarité homme/femme dans l'éducation des enfants n'est une constante ni dans le règne animal ni dans l'histoire des différentes sociétés. Pourtant, les opposants ne se contentent pas de dire que c'est le meilleur modèle, ce qui pourrait se défendre, mais que c'est le seul possible, alors qu'il en a existé et continue à en exister bien d'autres. Pourquoi cette insistance, sinon du fait d'un non-dit sur l'homosexualité, qui serait moins réelle, moins naturelle que l'hétérosexualité. Et c'est ce non-dit qui est une violence, pas seulement du fait de son contenu, mais précisément parce qu'il est un non-dit, une convention maintenue invisible et naturalisée?

Un témoignage reçu cette fois directement par mail, en réponse à mon article sur "l'homophobie introuvable", par une autre personne homosexuelle, très favorable pour sa part au projet de loi, quoique non politisée, m'a fait prendre conscience de l'énormité de cette violence, structurelle et invisible, et a été décisive dans la constitution de ma prise de position actuelle. Cette personne, qui a la mi-trentaine, est issue d'une famille catho de gauche, très modérée sur les questions de moeurs, et est elle-même, et a toujours été, athée. Elle vit actuellement et depuis longtemps dans un milieu plutôt favorable à l'homosexualité. Pourtant, ce n'est qu'à l'âge de 32 ans qu'elle a admis son homosexualité, et encore parce qu'elle a été mis dos au mur, ai-je cru comprendre. Plusieurs années après, elle ne l'a pas encore avoué à tous les membres de sa famille. Ce parcours m'a fait comprendre la force des stigmatisations symboliques associées à la représentation sociale de l'homosexualité, si fortes que même dans des milieux qui se veulent très "tolérants", celle-ci conserve un caractère honteux et inavouable, même à soi-même. Ce qui peut être analysée comme ce que Pierre Bourdieu appelait une "violence symbolique":

"C’est un processus de soumission par lequel les dominés perçoivent la hiérarchie sociale comme légitime et naturelle. Les dominés intègrent la vision que les dominants ont du monde. Ce qui les conduit à se faire d’eux-mêmes une représentation négative. La violence symbolique est source chez les dominés d’un sentiment d’infériorité ou d’insignifiance.
Les dominants assignent aux dominés un statut d’infériorité.
Ce statut engendre des situations dévalorisantes pour les dominés
Les dominés éprouvent un sentiment d’infériorité ou d’insignifiance
 [...] Ces réalités sociales confirment les représentations mentales
que les dominants se font des dominés
Si bien que la hiérarchie sociale apparaît « logique » aux yeux de tous.
Les dominants ont le pouvoir d’imposer leur propre vision comme objective et collective. Si bien que les dominés ne disposent pas d’autres modes de pensée que celui des dominants ; ils ne peuvent donc pas échapper à la violence symbolique. Tout se fait de façon implicite et non consciente. Cela rend toute contestation ou toute révolte extrêmement difficile. [...]
La violence symbolique n’est ni un processus d’influence, ni une vaste manipulation. C’est une croyance collective qui permet de maintenir les hiérarchies. Elle a pour effet la soumission des dominés sans que les dominants aient besoin d’avoir recours à la force.
 La violence symbolique consacre l’ordre établi comme légitime. Elle dissimule de ce fait, les rapports de force qui sous-tendent la hiérarchie sociale. Elle sert à pacifier les relations au sein de la structure sociale." ("La violence symbolique, qu’est-ce que c’est ?", Luttes d'influence sur le web et ailleurs, par Bénédicte Kibler).
Aucune société n'échappe aux rapports de force, et l'alternative de la violence symbolique est bien souvent la violence explicite. Elle n'est donc pas nécessairement mauvaise. Il reste qu'elle est invisible, et a pour propriété de faire passer des rapports culturels de domination pour des rapports naturels.

Ainsi, l'homosexualité, si elle est condamnée par les grandes religions abrahamiques, n'est pas un tabou social universel, comme l'était l'inceste aux yeux des structuralistes. Il y a des sociétés qui ont admis des amours homosexuels, et les ont même célébrés. Dans l'Occident chrétien lui-même, il a fallu de nombreux siècles pour que le jugement populaire accole une connotation négative forte à l'homoérotisme.

Ce mouvement de recul que nombre de contemporains, moi le premier, conçoivent spontanément au spectacle d'une relation homosexuelle n'est donc pas "naturel", mais nait de l'intériorisation d'interdits répétés par la culture. La coutume se fait "loi naturelle", rendu invisible et se voyant conférer une force d'"évidence" par la répétition dans les usages et les "bonnes moeurs"...

Tout l'enjeu de la revendication du mariage pour les personnes de même sexe, au delà de la forme matrimoniale en elle-même, et de la question de la parentalité, réside dans la lente entreprise de mise en évidence de cette "violence symbolique" qui au fil des siècles a imposé la vision de l'homosexualité comme d'une perversion, et l'acquisition de droits eux-mêmes symbolique pour déconstruire la relation inégalitaire entre homosexualité et hétérosexualité et faire changer le regard sur les personnes homosexuelles, afin d'intégrer à la norme dominante leur orientation. Il ne s'agit pas seulement de faire reconnaitre son amour, ou de bénéficier d'une reconnaissance juridique, ou de pouvoir élever des enfants, mais d'avoir la possibilité de faire "comme tout le monde", de ne plus être mis de facto au ban de la société. C'est ça le coeur de la revendication, et non "l'amour", ni un supposé "droit à l'enfant", ni la "théorie du genre" (qui n'existe d'ailleurs pas)...

Et c'est précisément ce qui pose problème à l'Eglise, qui n'a pas de place dans sa conception du mariage et de la famille comme "cellule de base" de la société, et qui explique qu'elle combatte systématiquement tout ce qui favorise une meilleure reconnaissance sociale de l'homosexualité. Pour reprendre les termes que le Père Cédric Burgun employait dans un billet contre le contrat d'union civile élargie, il s'agit d'empêcher une "institutionnalisation" de l'homosexualité. Pour les catholiques, l'homosexualité ne peut pas, ne doit pas avoir la même reconnaissance sociale que l'hétérosexualité (personnellement, si je suis au courant des condamnations de cette dernière dans la Genèse, le Deutéronome, les épitres de Saint Paul etc., il me semble que chaque souffrance exprimée par des parcours individuels, chaque discordance observée entre des vécus personnels et des enseignements contenus dans les Ecritures sont autant de questions que Dieu nous pose, et qui nous invitent à ne pas nous crisper sur la lettre mais à toujours aller au delà, dans une compréhension toujours plus grande et plus profonde de ce que signifie aimer Dieu et son prochain. C'est pourquoi j'approuve de tout coeur le billet de mon confrère blogueur Baroque et fatigué "La sainteté pour tous", où il voit dans le projet de loi une opportunité pour les homosexuels de construire un amour véritablement fécond, et où il invite l'Eglise à leur reconnaitre, au moins provisoirement, cette chance de cheminer vers une sainteté qui leur soit propre. Mais passons...).

Voilà donc ce qui me parait l'enjeu véritable de cette polémique, et qui explique qu'elle déchaine tant les passions. Ni la filiation, ni les conséquences hypothétiques de la loi sur l'épanouissement des enfants de couples homoparentaux, ni la PMA, ni la GPA, mais une violence symbolique, qui pose comme naturelle une hiérarchie entre les unions homosexuelles et hétérosexuelles, qui est considérée comme bénéfique pour le bien commun par une partie de la société, et comme destructrices des droits et des personnes pour l'autre. L'un des problèmes des manifestants, à mon avis, c'est qu'au lieu de poser clairement cet enjeu, qui est celui de la place de l'homosexualité dans notre société, ils ont cherché à le minimiser, voire à le nier.

Par exemple, ils se sont constamment récriés contre l'usage du terme "homophobie", assimilé à une novlangue. Or qu'est-ce que l'homophobie? Comme Tugdual Derville le rappelle dans l'entretien cité plus haut, elle inclut " haine, injure et discrimination injuste". Mais elle ne s'y réduit pas. Pour citer une blogueuse féministe, engagée pour les droits homosexuels:

"L’invention du terme « homophobie » a permis de mettre un nom sur des attitudes et des propos qui pouvaient jusque-là avoir droit de cité, faute de langage pour les dire et les condamner. Ce terme permet de donner une existence concrète à ce qui relevait jusque-là du ressenti et de l’informulé, comme l’ont fait en leur temps « racisme » (début du XXème siècle) et « sexisme » (début des années 1960). En devenant une réalité concrète, l’homophobie est peu à peu tombée, comme les autres discriminations, sous le coup de la loi . Elle fait aussi l’objet d’actions politiques de sensibilisation et de prévention. [...]
Le sens du terme hésite [...] actuellement entre deux pôles:
- le pôle psychologique, relevant du registre individuel: l’homophobie se définirait comme le rejet des homosexuel·le·s et de l’homosexualité; 
- le pôle idéologique, relevant du registre collectif: l’homophobie comme défense de l’inégalité des sexualités. Dans ce sens, on parle aussi d’"hétérosexisme "." (Genre!, "« Dans l’amour des homosexuels »: personne n’est homophobe")
Au premier sens, qui correspond à la définition de Tugdual Derville et qui  est le seul admis par les opposants au projet de loi, s'en ajoute un second: est homophobe tout ce qui contribue à maintenir l'"évidence" culturelle d'une supériorité intrinsèque, "naturelle", de l'hétérosexualité sur l'homosexualité. La création du mot "homophobie" vise précisément à nommer cette "violence symbolique" qui assure, aux yeux des homosexuels eux-mêmes, le sentiment que l'hétérosexualité est plus naturelle, et que leur orientation est une perversion ou une maladie (à noter que stricto sensu, ce néologisme est le contraire d'une novlangue, puisque dans le roman d'Orwell, cette dernière consiste justement à s'assurer que les rapports contingents de domination et d'opression ne puissent être nommés, et à faire disparaitre les termes qui permettraient de les rendre visibles).

Et c'est évidemment le cas de l'Eglise catholique, qui, comme un prêtre parmi mes "amis" Facebook vient encore de le rappeler hier sur sa page, encourage ses fidèles à lutter contre toute forme de plus grande reconnaissance sociale et juridique de l'homosexualité, donc de la plupart des catholiques français et de la base majoritaire de la Manif pour tous, qui ne reconnait pas qu'un couple formé par deux personnes de même sexe puisse apporter la même chose à un enfant qu'un couple formé par deux personnes de sexes différent, ou qui se précipite sur le témoignage d'homosexuels qui décrivent leur désir comme une blessure sans jamais, semble-t-il, le mettre seulement en regard avec celui d'autres homosexuels qui vivent leur orientation de manière plus épanouissante. On peut certes trouver le terme "homophobe" trop péjoratif, ou violent, ou essayer de justifier un jugement négatif sur l'homosexualité. Mais ce qui ne me parait pas soutenable, et qui est pourtant la voie majoritairement choisie par les opposants au projet de loi, est de faire reproche à ses défenseurs de mettre en cause le regard porté sur l'homosexualité au travers de celui-ci. Car il est clair que l'homosexualité n'est pas acceptée comme normale par une grande partie de la population, en particulier catholique, et que cela joue de manière décisive dans la perception des enjeux autour du mariage pour les personnes de même sexe (et surtout que des personnes en souffrent quotidiennement, et j'en connais). On peut critiquer l'étymologie du mot et les connotations qui y sont associées, mais pas l'amputer de la moitié de sa signification, celle "structurelle", alors qu'elle est clairement en jeu: il y a de manière évidente une lutte politique et culturelle pour déterminer si l'"institutionnalisation" de l'homosexualité est une détérioration ou une avancée sociale. On peut trouver le terme "homophobe" mal choisi mais pas nier que ce débat autour du mariage pour tous tire son intensité et sa virulence de la rencontre de regards différents sur ce que sont le désir et l'union homosexuels, en eux-mêmes et par rapport à leurs équivalents hétérosexuels.

Et ce qui représente pour moi la grande violence de la Manif pour Tous, c'est précisément de chercher à le dissimuler ou le minimiser par tous les moyens. En soulignant (comme le rappelle l'affiche qui illustre ce billet) que ce n'est pas un problème urgent, elle nie la souffrance des homosexuels qui voit leur union reléguée au rang de sous-relations. En donnant la parole, exclusivement, aux quelques homosexuels opposés au projet de loi, pour donner l'impression qu'elle défend une meilleure intégration des gays. En se prétendant "contre l'homophobie", alors qu'elle cautionne cette violence symbolique qui valide une représentation de l'homosexualité comme "différente" et moins"naturelle" et qu'elle ne fait rien de concret pour battre en brèche les préjudices vécus au jour le jour par la plupart des homosexuels. En prétendant que la contestation d'un projet de loi qui s'intitule "mariage pour les personnes de même sexe" n'a rien à voir avec l'union des personnes de même sexe. En infantilisant les motifs de leur revendications en les présentant comme peu sérieux: par la condamnation d'un "droit à l'enfant" que personne à ma connaissance n'a soutenu, en les accusant de "réduire" le mariage à l'amour. En leur tendant un "contrat d'union civile élargie" comme on donne un jouet à un enfant pour qu'il arrête de pleurer, comme si une union distincte du mariage pouvait satisfaire cette attente fondamentale qui est d'être perçu "comme tout le monde" et de se voir reconnaitre les mêmes droits que "tout le monde". En se plaignant, lorsque des homosexuels se laissent aller à la colère et la mettent en cause, d'être en butte à la "haine" LGBT, elle leur nie le droit d'exprimer leur révolte face à un mouvement qui nie le caractère naturel de leur relation, et de leur orientation sexuelle, qui accuse implicitement les couples homoparentaux qui existent déjà de fait de faire souffrir leurs enfants. Enfin, en niant que les homosexuels soient à l'origine de leur propre parole, de leur propre demande, en attribuant à celle-ci des commenditaires et des mobiles sombres et mystérieux: un "lobby minoritaire" (je ne dis pas qu'il n'y a pas lobby LGBT ni de radicalisation politique de certains homosexuels, mais pour en connaitre d'autres non politisés, je peux témoigner que c'est une revendication très largement partagée au delà), la "théorie du genre", la destruction des valeurs judéo-chrétiennes de notre société...

J'ai eu il y a quelques jours un clash assez sérieux sur ma page Facebook avec le blogueur catholique Koz. Je venais de partager un texte d'une universitaire et militante LGBT qui s'amusait à comparer les arguments des opposants au projet de loi et ceux des antis mariage mixte aux Etats Unis, au siècle dernier, en relevant toute une série de similitudes. Il l'a interprété comme une accusation de racisme, en qualifiant l'entreprise de "minable", "odieuse" et "insultante", et en se disant "plutôt déçu" que je la reprenne à mon compte. Ce texte est délibérément polémique, et je comprends qu'il prenne très fortement à rebrousse-poil les opposants au projet de loi: il est étudié pour. Mais enfin, il ne s'agit pas de les taxer de racisme, mais de souligner que dans les deux cas, il s'agit de nier à une catégorie de la population l'accès aux mêmes droits qu'à la majorité. Ce qui en fait, je suis désolé de le dire, une comparaison valide. Certes, d'un côté, on a une inégalité qui est perçue aujorud'hui, de manière très largement partagée, y compris bien sûr chez les catholiques, comme une injustice. Et de l'autre, un autre type d'inégalité dont la condamnation ne fait pas du tout consensus. Mais quand on voit que les mêmes arguments, qui se sont révélés faux pour la première, sont repris quasiment à l'identique pour la seconde, on ne peut pas faire autrement, je regrette d'avoir à le dire, que de s'interroger sur leur opportunité et leur validité. Par exemple, des arguments tels que: "le vote de la loi va augmenter les violences contre les homosexuels", ou "les enfants d'homosexuels seront brimés à l'école" (qui sont hypocrites parce qu'il justifient le maintien d'une discrimination par la lutte contre celle-ci) ou encore que la légalisation du mariage homosexuel est la porte ouverte à l'inceste, ce sont des arguments que j'ai lus à de nombreuses reprises depuis cet automne, y compris sous la plume de certaines personnes qui ont "liké" le post de Koz où il exprimait son indignation à l'encontre de ma publication. Et je trouve profondément triste qu'il y ait une telle unanimité pour se plaindre de se sentir insulté (comme si ce n'était pas insultant pour les couples homoparentaux déjà existants de s'être fait remis en cause de façon péremptoire depuis des mois et des mois, par exemple au nom d'un "principe de précaution" qui ne parait guère applicable en loccurence, d'une part parce qu'un tel principe ne peut être qu'une morale provisoire en attendant une vérification, et on en va pas élever des familles homoparentales de souris blanches en laboratoire pour vérifier que tout se passe bien, et d'autre part parce que l'action politique, qu'il s'agisse de décisions sociales, économiques, militaires, consite précisément à savoir prendre des risques calculés), amis que personne ne s'interroge sur la similitude effective des arguments, qui ne se réduit pas à des "coïncidences", mais met en évidence des modes et des contenus de raisonnement identiques.

Donc, le message de la Manif pour tous est violent. Et pourtant, elle ne cesse d'insister sur son caractère "pacifique", "familial", sur la sérénité et la profondeur des rassemblements des Veilleurs, sur l'humour des manifestants venant servir un petit déjeuner à Chantal Jouanno, sur la bonne humeur et la "bonne éducation" des manifestants. C'est réduire la violence à sa manifestation explicite. Mais si nous y réfléchissons, nous faisons tous l'expérience, quotiennement, que la violence, et souvent la pire d'entre elle, celle qui brise au jour le jour nles individus, n'est ni visible, ni consciente. Prenons un exemple qui est différent de la Manif pour Tous, et dont nul ne niera la gravité: le harcèlement en milieu scolaire. Celui-ci comporte certes une part de violence explicite et consciente: celle de la brute qui va s'acharner sur plus faible que lui, en le moquant, voir le frappant, continuellement. C'est un aspect du harcèlement: mais ce qui lui donne sa vraie force, et sa plus grande violence, c'est que souvent, il n'est pas reconnu comme tel par les observateurs, élèves, parents et enseignants, de ces actes. Il est souvent minimisé: "c'est de l'humour", "ça fait partie de la vie", "ça va finir par passer", "il faut s'endurcir", "la victime le cherche aussi un peu"... Un autre exemple, saisissant, nous a été donné récememnt dans le dossier sur le sexisme dans le milieu geek monté par la militante féministe Mar Lard: à le lire, on voit bien que si les actes graves sont le fait d'une petite minorité active, ils sont rendus possibles par le fait qu'ils sont constamment minimisés par une majorité pourtant constituées de peronnes que le sexisme dégoûte par principe, au point de devenir invisibles. On ferme les yeux sur la violence, on la banalise... De telle sorte qu'on finit par ne plus la voir, et par se persuader que les victimes qui la dénoncent "exagèrent", se "font des idées", sont "hystériques" et j'en passe...

Je sens que je ne vais pas me faire beaucoup d'amis sur ce coup, mais je suis persuadé qu'il y a un phénomène similaire à l'oeuvre dans la Manif pour Tous. Certes, elle condamne (sincèrement je crois) les violences physiques. Certes, elle a court-circuité d'emblée Civitas. Certes, elle s'est quasi immédiatement désolidarisée du Printemps Français. Certes, elle a veillé à exclure de sa communication toute mise en cause explicite de l'homosexualité. Mais ce faisant, elle a délibérément occulté ce qui reste (et je n'en démordrai pas) l'enjeu de fond du projet de loi: la place qu'ont les homosexuels dans notre société, et la perception quue celle-ci en a: sa reconnaissance doit-elle être institutionnalisée, doit-elle être considérée comme "normale", ou au contraire doit-on lutter contre sa "banalisation", continer à valoriser l'hétérosexualité comme seule manière saine (et sainte) de vivre sa sexualité (hors l'abstinence)? Nous savons tous que beaucoup de manifestants optent pour le second point de vue, et que c'est un mobile important de leur mobilisation. J'en ai donné des exemples plus haut, qui ne sont pas vraiment des excités du GUD et de Civitas. Mais on le nie ou on le minimise (un autre exemple: quand Ariño s'est plaint d'avoir été écarté de la Manif du 13 janvier, j'ai vu passer nombre de tweets et de messages sur Facebook de manifestants lui expliquant que son analyse du désir homosexuel était très importante, mais qu'on ne pouvait pas la mettre trop en avant, que ça risquait d'être mal perçu. Or, cette analyse consiste en une condamnation de ce désir, perçu comme intrinsèquement malsain et destructeur. La condamnation de l'homosexualité en tant que tendance est donc bien l'un des mobiles fondamentaux de l'opposition au projet de loi, mais elle est pasée sous silence, minimisée). Etc'est ça qui est violent: non seulement on répond "non" à la demande d'une majorité d'homosexuels que leur orientation soit considérée comme normale, mais on nie qu'on a dit "non", on leur reproche d'être de mauvaise foi quand ils le font remarquer, et on leur ôte ainsi toute chance de défendre leur point de vue et leur désir, et de dénoncer la violence dont ils s'estiment victimes:

"En quoi consiste alors le "oh, c'est bon, c'est de l'humour" ou le "tu comprends pas le second degré ou quoi ?" qui est la défense si souvent utilisée dans ces cas-là ? Il ne s'agit pas seulement d'une tentative de sauver la face - "je ne suis pas raciste voyons". Il s'agit aussi d'une attaque contre la face de l'autre : après avoir détruit une première fois la représentation positive que l'autre essaye de donner de lui, vous en remettez une couche en détruisant une autre partie de cette face. Une double peine en quelque sorte : c'est un peu comme si, après avoir marché sur le pied de quelqu'un, vous lui donniez une gifle parce qu'il a crié de douleur. Se faisant, vous sacrifiez en fait l'interaction que vous pouvez avoir avec l'autre, et avec tous ceux qui peuvent soit partager son identité soit être d'accord avec son point de vue, pour le droit de faire une blague. Autrement dit, pour une chose qui censé être sans importance, vous êtes prêt à sacrifier des relations, des interactions, peut-être des amis...
C'est donc que c'est loin d'être sans importance : contrairement à ce qu'elle semble dire, la réaction "ce n'est que de l'humour, c'est pas grave" vient en fait défendre quelque chose d'extrêmement important, auquel les individus sont suffisamment attachés pour faire des sacrifices non négligeables en son nom. Quel est donc cette chose qui se cache derrière le droit à l'humour ? Goffman souligne que l'embarras intervient souvent dans des situations où les individus sont amenés à devoir combiner plusieurs rôles apparemment contradictoires. Pourquoi l'embarras est-il si courant à la machine à café ou dans l'ascenseur ? Parce que dans ces lieux, des individus qui ne sont pas égaux - la chef de service et le secrétaire, l'enseignant chercheur et l'étudiant de première année, le médecin chef et l'aide soignant - se retrouvent dans une situation où ils devraient être égaux.[...]
Cette analyse ne se limite pas à l'humour. Il n'est pas rare que l'on s'entende dire que certains changements sont superflus pour les mêmes raisons, parce que les choses sur lesquelles ils portent ne feraient pas sens pour les individus : pourquoi abandonner l'utilisation de "mademoiselle" alors que les gens n'y font pas attention ? Pourquoi changer le nom des écoles maternelles, alors que, voyons, le soin des enfant est également réparti dans le couple ? (Hein ? Comment ça, ce n'est pas le cas, et le plus gros revient encore aux femmes ? Vous êtes sûrs ?) Seulement voilà : il y a des gens qui sont prêts à se battre pour que ces choses-là ne changent pas : il faut donc croire qu'elles ne sont pas à ce point sans importance. On peut quand même se demander pourquoi les forces les plus conservatrices se liguent soudain contre ces changements... Un autre prétexte est souvent qu'il y a des choses "plus urgentes à faire" : pourquoi alors refuser des petits changements simples et peu coûteux, en perdant beaucoup de temps à lutter contre ? Une fois de plus, si tout cela est sans importance, la réaction ne devrait pas être de détruire la face de l'autre... Toutes les protestations ressemblent au final à celle-ci : on commence par dire que ce n'est pas grave, que c'est sans importance, qu'il y a plus urgent... pour au final expliquer que "l'équité ne passe pas par l'égalité arithmétique" (je soupçonne l'auteur en question d'avoir eu son diplôme de philosophie en lisant le rapport Minc...). Autrement dit, il ne faudrait quand même pas dire qu'une société juste passerait par une égale liberté des individus à être ce qu'ils veulent, il faut quand même que les hommes restent des mecs, les femmes des gonzesses, et qu'on ne confonde pas. Comme toujours, ce que l'on dit sans importance a en fait suffisamment d'importance pour que l'on passe du temps à le défendre." (Une Heure de Peine, "L'impolitesse du désespoir", par Denis Colombi).
Ce qui m'amène à une double interpellation (puisqu'il me parait y avoir deux catégories de manifestants):

- Vous qui êtes sincères lorsque vous dites accepter l'homosexualité comme une orientation sexuelle "normale", et qui ne vous inquiétez que des conséquences du projet de loi sur la filiation, félicitation pour votre capacité à faire la part des choses. Si vous êtes catholiques (ou d'une autre religion condamnant l'homosexualité) comment assumez-vous cet écart entre votre opinion intime et ce que vous dit l'Eglise? Pourquoi fait vous comme si vous étiez sur la même ligne qu'elle alors que vous êtes en désaccord avec son enseignement? Quel regard devrait être pour vous celui de l'Eglise sur l'homosexualité, et que comptez-vou faire pour faire connaitre et mettre en débat votre conviction?

-Vous qui êtes sincères dans votre jugement de l'homosexualité comme une tendance "objectivement désordonnée), félicitation pour votre fidélité au Magistère. Pourquoi ne dites vous pas plus fort cette conviction, et la cachez-vous derrière des questions distinctes (la filiation, la GPA...), comme autant de doubles discours? Si c'est votre foi, pourquoi ne pas la montrer à tous, comme le demandait le Christ ("Personne n'allume une lampe pour la mettre dans un lieu caché ou sous le boisseau, mais on la met sur le chandelier, afin que ceux qui entrent voient la lumière." Luc 11, 33)? Vous dîtes condamner l'acte homosexuel, mais aimer la "personne" des homosexuels, alors pourquoi ne leur accordez vous pas l'opportunité de répondre à votre condamnation, de partager l'expérience de leur désir, y compris quand elle contredit et non pas confirme ce que vous en avez retiré de votre interprétation de la Tradition et des Ecritures? Pourquoi les priver de parole, de l'opportunité de défendre leur cause, et les condamner a priori? Dieu a bien donné séance à Job, qui blasphémait... Et pourquoi demandez-vous un débat, des "états généraux", alors que vous savez très bien que le discours de l'Eglise sur l'homosexualité est "non négociable", que ce ne peut être au mieux qu'un débat à sens unique, que vous demandez aux défenseurs du projet de loi ce que vous mêmes estimez dans votre coeur ne pourvoir faire: remettre en cause une conviction sur ce quest l'homosexualité et ce qu'elle doit ou ne doit pas permettre? Comprenez-vous combien votre demande de "débat" a pu apparaitre comme une maneuvre dilatoire, destinée à gagner du temps et à court-circuiter le fonctionnement de la démocratie représentative parlementaire?

Car voilà la violence de la Manif pour Tous: nier que la question de l'homosexualité soit porteuse de sens dans un débat sur la situation des homosexuels. Nier qu'ils soient les auteurs de leur revendication.... Nier, contre toute évidence, que leur condition n'est pas encore perçue comme normale en France aujourd'hui... Nier qu'on leur refuse le droit d'accéder à cette normalité, au moment même où on le fait... Dissimuler soigneusement cette violence qui leur est faite, par des couleurs vives, des chants joyeux des prières (des prières...)... C'est une violence qui va plus loin en un certain sens et finalement que celle de la Passion, et de "l'homme de douleur" d'Isaïe ( "il était si défiguré qu’il ne ressemblait plus à un homme. … Il n’était ni beau, ni brillant pour attirer nos regards, son extérieur n’avait rien pour nous plaire. Il était méprisé, abandonné de tous, homme de douleurs, familier de la souffrance, nous l’avons méprisé, compté pour
rien. …Maltraité il s’humilie, il n’ouvre pas la bouche…arrêté puis jugé, il a été supprimé… il
 a été retranché de la terre des vivants, frappé à cause des péchés de son peuple…
"  Is 52), car au moins celui-ci est défiguré et humilié publiquement: il y a une violence publique que l'on peut montrer du doigt, discuter, dénoncer, à la manière de celle verbale de Civitas et celle physique du GUD. Mais celle de la Manif pour Tous,qui vole leur visage aux homosexuels par des sites tels qu'Homovox, qui ne donne la parole qu'à ceux qui estiment que leur condition est une "blessure", qui vole leur discours en leur disant qu'ils ne seront jamais comme les autres, jamais normaux tout en prétendant les aimer et "partager" avec eux, c'est une violence invisible, qui non seulement frappe, de manière insidieuse, mais se dérobe à toute riposte, toute réclamation, tout dialogue véritable, c'est-à-dire bipartite... C'est une violence d'anéantissement...

Et c'est mal! Et c'est indigne de l'Eglise et de toutes les personnes par ailleurs très bien (et j'en connais et je peux en témoigner), qui s'y associent!

51 commentaires:

  1. Bravo. Je vous lis depuis un moment, vous me découragez de créer mon blog parce que vous écrivez ce que je voudrais écrire ;-)
    Vous écrivez ici ce que j'essaye de dire à des amis, sans les blesser, en respectant leurs choix et leur sincérité.
    Ce commentaire est donc vain, puisqu'il ne nourrit pas la discussion, mais votre texte m'a fait trop de bien pour que je me prive de vous en féliciter.

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  2. Merci! :-)

    N'hésitez pas à ouvrir votre blog quand même: on apprend beaucoup sur soi-même et sur les sujets qu'on traite en essayant de rédiger un billet un tant soit peu précis et nuancé...

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  3. Manifestant à la manif pour tous, j'ai lu avec attention votre billet. J'ai rarement vu un argumentaire aussi intéressant de la part d'un adversaire (car vous en êtes un pour moi) et je vous félicite donc pour la clarté de votre raisonnement et la profondeur des idées exprimées.

    Bien sûr, je ne suis pas d'accord avec la pointe de ce que vous exprimez.

    Je pense que le mot "homophobie" est un mot-piège, car comme vous le dites, il présente deux sens différents, c'est pourquoi je ne répondrai jamais par oui ou par non à la question "êtes-vous homophobes ?", mais je répondrai par une question "qu'est-ce que l'homophobie ?".

    Notre problème est double.

    D'une part, nous ne souhaitons pas poser dans l'espace public un jugement moral sur les comportements homosexuels. Il s'agit d'un comportement de nature strictement privée.

    D'autre part, nous avons la conviction intime qu'un couple de même sexe n'est pas la structure la meilleure pour accueillir un enfant.

    Donc, oui, dans le débat sur le bien commun qui nous fait entrer dans un discours politique, nous considérons et nous affirmons qu'un couple homme-femme est supérieur à un couple de même sexe dans le contexte du mariage et de la filiation. Vous remarquerez que le jugement porté n'est plus un jugement moral mais un jugement "politique".

    Je comprends que les personnes homosexuelles peuvent se trouver blessées par ce jugement politique. Je comprends que les personnes homosexuelles ont soif de normalité et donc de reconnaissance. Bien entendu, nous assumons tous qu'une personne homosexuelle est égale en dignité et en droit.

    Surprenant ? Non ! Le mariage était une institution définie (jusqu'à hier) comme un relation homme-femme reconnue par la société pour fonder une famille. Le soi-disant "mariage pour tous" est donc pour nous une redéfinition du mariage. Il ne s'agit pas d'étendre un droit, mais de changer la définition du dictionnaire (c'est déjà fait). Voilà pourquoi nous considérons que c'est de la novlangue...

    Nous disons que ce désir de normalité, ce désir de mariage, ce désir d'enfant ne doivent pas devenir une loi. La loi n'est pas là pour répondre à des désirs mais pour les structurer, pour les réguler, pour les limiter.

    Alors oui, ce débat a fait naître une grande violence dans la société française. Oui, la violence a été grande. Peut-être avez-vous été blessés par une violence non-exprimée, mais nous, nous avons été blessés par une violence, elle, clairement exprimée par nos adversaires (pas tous). Pas seulement par les hommes politiques (et leur déni), pas seulement par les médias (et leur déni), pas seulement dans les blogs (et leurs tombereaux d'insultes et de caricatures), mais également dans la rue (beaucoup d'injures).

    Nous avons fait ce que nous avons pu pour manifester notre désaccord avec ce qui, selon nous, défigure le mariage. Nous avons essayé de le faire de façon festive, nous avons essayé de débattre, nous avons essayé les slogans (forcément réducteurs), nous avons essayé les actions pour attirer l'attention, nous avons essayé la non-violence.

    Mais rien n'y fait, nous avons été niés, insultés, moqués, violentés.

    Alors, comment pouvons-nous sortir de ce dialogue de sourds ? Les débats parlementaires n'ont pas été dignes, ni ceux organisés par les médias. Si personne ne s'écoute, comment parler ensemble ?

    Comment sortir de cette impasse ?

    P.S. Je comprends la réaction de koz, le texte n'est pas amusant, il est odieux dans la comparaison qu'il fait, mais surtout absurde de par l'utilisation que l'on peut en faire pour d'autres causes (la polygamie, l'inceste, ...) : tous les arguments cités peuvent être réutilisés pour justifier l'injustifiable (le déclin de la civilisation, le spectre des comportements tabous, l'hypocrite non-exclusion du mariage, l'intérêt supérieur de l'enfant, la religion...). Super.

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    1. Merci pour cette réponse apaisée et argumentée.

      "D'une part, nous ne souhaitons pas poser dans l'espace public un jugement moral sur les comportements homosexuels. Il s'agit d'un comportement de nature strictement privée."

      Je ne crois pas que pour des choix qui engagent aussi profondément l'existence d'une personne (et on pourrait faire un parallèle avec la foi, les opinions politiques, ...), il convienne de parler de "comportement strictement privé". Parce que le strictement privé n'existe pas vraiement , à bien y réfléchir. Nous ne nous posons, nous définissons, pas seulement par rapport à nous mêmes, mais aussi par rapport au regard posé sur nous par autrui, nos ^proches certes, mais également notre société d'appartenance. Nous nous construisons non seulement par rapport à nos désirs, mais également en vue d'être reconnus. Et comme tout le monde, les homosexuels (ceux en tout cas qui font le choix d'assumer et vivre pleinement leur sexualité) sont travaillés par ce désir de reconnaisssance. Ils désirent non seulement pouvoir s'unir et fonder une famille, mais également, et peut-être surtout, pouvoir le faire sans être jugés, sans être mis à part par le regard qu'on pose sur eux. On peut leur refuser cette demande, mais autant le faire franchement, et être prêt à en débattre publiquement.

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    2. "Alors, comment pouvons-nous sortir de ce dialogue de sourds ? Les débats parlementaires n'ont pas été dignes, ni ceux organisés par les médias. Si personne ne s'écoute, comment parler ensemble ?"

      Je pense que le gros problème des opposants aux projets de loi, c'est que globalement, depuis les débats sur le PACS, il n'y a pas eu de véritable réflexion de l'Eglise (puisque les opposants sont majoritairement catholiques et qu'elle s'est beaucoup impliquée dans le mouvement) et de ceux qui partagent son "anthropologie", ni sur l'homosexualité en tant que telle, ni sur la différence des sexes, alors que beaucoup de travaux ont depuis, par ailleurs, été publiés sur le sujet, et que le regard de la base catholique sur l'homosexualité a, lui, changé.

      A force de lire tous les jours des posts d'opposants sur twitter et facebook, il m'est apparu clairement que sous le consensus apparent, coexistent des regards radicalement différents sur l'homosexualité, et la place que notre société devrait lui accorder, notamment juridiquement. Dans la Manif pour tous (et je parle bien de la manif, pas de civitas ni du printemps français) on trouve ausi bien des gens qui sont dans la droite ligne de la position officielle de l'Eglise et qui estime que l'homosexualité ne doit pas obtenir une reconnaissance juridique, quelle qu'elle soit (le Père Burgun par exemple), et d'autres qui sont sincèrement favorable à celle-ci, et même au mariage, mais qui sont embêtés par les conséquences sur la filiation.

      Ce non dit a à mon avis pesé lourd dans l'évacuation de la question de la reconnaissance sociale et juridique de l'homosexualité, pourtant centrale dans le débat, et dans cette manière un peu ridicule de nier toute "homophobie", alors que pour la plupart d'entre nous, et moi le premier, tout en pouvant avoir des amis homosexuels, nous trouvons cette orientation tout de même "un peu bizarre": en général un couple d'hommes ou de femmes attire un peu plus le regard dans la rue qu'un couple hétéro. (http://aigreurs-administratives.blogspot.fr/2013/01/lhomophobie-introuvable.html )

      De même, l'affirmation de la complémentarité des sexes et la nécessité d'un noyau parental homme-femme ne vont nullement de soi, et sont démentis par un grand nombre de travaux récents en anthropologie, ethnologie, sociologie, histoire, neurologie, et j'en passe. Et bien sûr par les fameuses "études de genre", qu'on peut bien sûr critiquer. Le problème, et bien qu'il y a ait eu des plémqiues à leur sujet très en amont de l'arrivée du gouvernement socialiste au pouvoir, est que ces critiques sont souvent restées inopérantes, tout simplement parce que la plupart des opposants n'ont pas pris la peine d'en lire pour de vrai. Je ne dis pas qu'il faut s'agenouiller devant, mais se les approprier, comme le christianisme a fait par le passé pour tant de courants qui étaient au départ hostiles à ses thèses, me parait indispensable. Voici un exemple de critique intelligente, qui se situe dans la ligne de "l'anthropologie de l'Eglise" mais qui sait de quoi elle parle et est à l'écoute des études de genre:http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=RETM_269_0075

      De même, on a posé cette "anthropologie" de l'Eglise, qui affirme cette complémentarité "homme-femme", comme évidente, tout en semblant ignorer qu'il existe une anthropologie universitaire qui affirme souvent le contraire. Il aurait fallu mettre clairement en débat les deux: http://aigreurs-administratives.blogspot.fr/2013/03/anthropologique-vous-avez-dit.html

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    3. "Comment sortir de cette impasse ?"

      Cette impasse vient à mon sens d'un manque de préparation. Lorsque tout semblait paisible, il aurait fallu mener tout un travail de réflexion théorique sur la place de l'homosexualité dans l'Eglise et dans la société, sur l'écart grandissant entre la défense par l'Eglise de la "complémentarité des sexes" et sa remise en cause radicale par une partie de l'Université. Tout cela a été trop peu fait, et généralement de manière trop polémique et pas assez informée (même s'il semble y avoir aujourd'hui de petits progrès). On ne peut pas découvvir brutalement découvrir toutes ces questions lors d'une lutte politique, et espérer que quelque chose de bon sorte de cette dernière. Donc, maintent que l'essentiel du conflit est derrière nous (quelque soit la décision du CC, ni les pros ni les antis n'y pourront grand chose), je pense la meilleure manière de sortir de cette impasse est de poser enfin dans toute leur largeur et leur profondeur ces questions théoriques qui ont été trop souvent esquivées jusqu'ici, et entamer un vrai dialogue avec la science profane. En attendant (et préparant), la prochaine polémique...


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    4. "Je comprends la réaction de koz, le texte n'est pas amusant, il est odieux dans la comparaison qu'il fait, mais surtout absurde de par l'utilisation que l'on peut en faire pour d'autres causes (la polygamie, l'inceste, ...) : tous les arguments cités peuvent être réutilisés pour justifier l'injustifiable (le déclin de la civilisation, le spectre des comportements tabous, l'hypocrite non-exclusion du mariage, l'intérêt supérieur de l'enfant, la religion...). Super."

      Mais ces arguments ont justement été utilisés, et par des opposants tout ce qu'il y a de plus modérés, contre le projet de loi!!! Alors le texte visait à faire mal, c'est sûr, mais il tire aussi de vraies sonnettes d'alarme: pourquoi ne pas le reconnaitre?

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    5. Bonjour.
      Je suis pour ma part très frappée dans mes discussions avec des opposants, dont des amis, par soit le fait de ne pas assumer une homophobie réelle (considérer que les couples homos n'en sont pas vraiment, et ne sont pas aussi dignes que les couples hétéros, c'est de l'homophobie, pour une raison simple : c'est faux), soit le fait de, parce qu'eux ne sont vraiment pas homophobes, ne pas entendre que les partisans de la loi soient choqués de voir ensemble des gens qui pensent en fait des choses très différentes. Un de mes amis est pour une union civile assortie de la possibilité d'adoption simple : cela ne me convient pas, certes, mais c'est très différent d'une union civile sans adoption du tout, et encore plus de pas de reconnaissance juridique du tout. Or, je trouve curieux et gênant pour ma part de s'associer, quand on est prêt à union civile + adoption simple, à des gens qui disent que la loi va assassiner des enfants, faire des enfants playmobil, alimenter les réseaux pédophiles (tout ceci ayant été dit à l'Assemblée)... Il y a chez certains opposants une négation de la violence réelle d'une partie de l'opposition qui n'est ni Civitas ni le GUD. Et cela a vraiment contribué à ma propre crispation - la violence elle-même, et la négation de cette violence par les manifestants. C'est en cela que je trouve le billet de Darth Manu excellent.
      L'Eglise, pour se limiter à elle, sachant que l'opposition à la loi ne s'y limite pas, n'a fait aucune place publique à d'autres voix que celle de la hiérarchie (et de Philippe Arino, qui est quasiment la même et sa caution). En son sein, les cathos favorables à la loi ont eu le sentiment, douloureux, de n'avoir aucune existence. J'affirme qu'il y a bien eu de la violence au sein de l'Eglise, et qu'il y en a de longue date sur ces questions. Bien sûr nous ne serons pas excommuniés (mais ne sommes-nous pas pécheurs publics à exclure de la communion, en revanche ? C'est une vraie question, pas de la provoc, je repense soudain à l'encyclique de JPII sur cette question), et encore moins lynchés publiquement. Mais l'indifférence, quand elle n'est pas ignacienne, est aussi une forme de violence.
      Quant à la violence faite aux homos, moi qui ne le suis pas j'en ai ras-le-bol d'entendre parler de leur souffrance parce qu'ils sont homos. Ils souffrent du regard que la société (et l'Eglise, dans le cas des cathos) porte sur eux, pas d'être homos. Mes amis homos vont bien, merci pour eux, et ils veulent se marier aussi pour le dire publiquement.

      J'ajoute que j'ai pu parler (écrire, plus précisément) à des amis opposants parce que nous avons dès le départ admis que nous ne nous convaincrions pas mutuellement. Cela peut sembler triste, comme constat. En même temps, c'est aussi un soulagement réel que d'être écouté avec respect, même dans le désaccord.

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    6. Le déclin de la civilisation, les comportements tabous, la religion (je suppose qu'il faut comprendre "le dénigrement de la religion"),
      Oui, on peut utiliser des textes dénonçant le racisme pour dénoncer la religion, pour prôner ce que vous nommez "déclin de la civilisation", mais qui n'est en fait que le déclin, la mort naturelle, de vos idées au sujet de ce qu'est la Morale.

      Est-ce "injustifiable" de dénoncer la religion ? Non, je ne crois pas, car la religion est une relique du passé, qui s’accroche à une existence qui la rejette, avec les méthodes (et ça se comprend) d'un animal se sachant menacé et répliquant à coups de griffes et de crocs (personne ne -veut- disparaître).
      Car, oui, la religion est en voie de disparition : on peut voir à la virulence qu'elle met à s'accrocher à l'existence, les signes de la disparition prochaine d'une chose.
      Oui, la religion va disparaître, et c'est bien, c'est un cycle tout à fait naturel, car elle ne sert plus à rien, et ne fait que retenir en arrière une humanité qui n'a plus besoin d'elle, comme un enfant n'a progressivement plus besoin de couches-culottes.
      La lutte contre l'homosexualité fait partie de ces maintiens en arrière, car l'humanité est en train de comprendre que les distinctions de sexualité n'ont plus de sens. L'humanité est en train de comprendre qu'on peut aimer une personne, qui peut être n'importe quel humain librement consentant, et que cela n'entraine aucun concept de mal, ni même de bien.
      Oui, la morale se "relativise", car, non, il n'y a aucune vérité absolue, seulement des perceptions, elles-mêmes tout à fait relatives et bien entendu non fixes.

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  4. Bravo pour ce billet plein de vérités (Vérité ?) où l'on voit à la fois la richesses des échanges sur la Toile et la qualité de ton esprit d'analyse, de synthèse et de ta plume :-)

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  5. Ce billet m'avait échappée...je me suis rattrapée. C'est juste très bon d'entendre d'autres sons de cloches, très justes. Merci.Ce qui me frappe depuis le début dans tous les débats des uns et des autres, c'est le peu de référence que l'on fait à l'Evangile, à la Parole. On me taxera de naïve ou d'inconséquente, je m'en fiche un peu mais "aimer son prochain" au-delà de nos différences, je ne l'entends pas. S'il est certain que l'on naît d'un père et d'une mère, si cela est irréfutable, s'il est nécessaire de connaître nos racines pour tenir debout,au-delà, je reste persuadée qu'il n'existe aucun modèle idéal pour grandir hormis celui de grandir avec de l'amour, de la confiance et du respect.Et ceux qui parlent moins haut, moins fort n'ont pas forcément tort;-)

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  6. Superbe analyse dans ce long billet cliqué par hasard. Un argumentaire précis et respectueux de chacune des parties avec un fond de sociologie/anthropologie. Etudiant ces matières je ne peux qu'apprécier!
    Rien que d'entendre qu'il n'existe qu'un modèle de famille viable (j'exagère) me fait bondir. Quelques cours de sociologie de la famille seraient nécessaires à certains pour qu'on arrête de se regarder le nombril. Alors merci de mettre à l'écrit ce que j'ai tant de peine à faire comprendre! :)
    Et merci aussi pour l'explicitation de la violence symbolique. J'avoue avoir sauté quelques paragraphes pour vérifier si vous n'alliez pas y venir avant de reprendre ma lecture.
    Vraiment, merci beaucoup pour ce rayon de bonne réflexion appaisée ! :)

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  7. Il faut aller au bout des raisonnements :
    C'est une évidence : aucun enfant ne peut naître naturellement d'une union homosexuelle, il ne s'agit pas d'une opinion mais de la réalité ! Et c'est bien cette inégalité (biologique) que les LGBT cherchent à surmonter.
    Mais alors
    Si on veut corriger complètement cette inégalité, ça suppose :

    1. d'imposer la contraception aux hétéros
    2. de n'autoriser que les bébés éprouvette (on aura bientôt des utérus artificiels).
    3. de proposer les dits bébés à l'adoption indépendamment de l'orientation sexuelle des adoptants.
    Si on ne va pas jusque là, on va de fait créer de nouvelles inégalités.
    La conséquence inéluctable sera la sélection génétique pour satisfaire aux désirs des adoptants et/ou aux besoins économiques.

    C'est exactement ce qui est décrit dans "Le meilleur des mondes" d'Aldous Huxley, une société sur le modèle de la fourmilière ou de la ruche, le rêve de tous les totalitarismes.

    "Le meilleur des mondes" est paru en 1936 - et à l'époque, c'était de la science fiction, mais aujourd'hui il est à notre porte ...

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    1. - un certain nombre d'homos veulent se marier et ne veulent pas d'enfants - comme un certain nombre de couples hétéros. le fait d'avoir des enfants n'est ni une obligation ni une condition pour le mariage.
      - l'inégalité biologique entre un couple stérile et un couple fécond n'a provoqué ni la contraception obligatoire, ni l'interdiction des "bébés faits maison".
      - les règles de l'adoption internationale dépendent des pays qui confient leurs enfants à l'adoption. Certains l'interdisent déjà aux couples ayant déjà des enfants, aux célibataires, fixent des conditions d'âge, de religion, de richesse... Certains y ajouteront l'interdiction aux couples homos, oui ; d'autres (très minoritaires, indéniablement) confieront effectivement les enfants indépendamment de l'orientation sexuelle des parents, faisant confiance aux organismes français pour trouver de bons parents.
      - l'adoption d'un pupille en France est en pratique réservée aux couples hétéros jeunes et stériles, dans l'état actuel des choses (et ayant un niveau socio-économique et culturel jugé satisfaisant). Elle est de fait inégalitaire au regard des couples postulants.
      Rien de tout cela n'amène à la sélection génétique. Ce qui s'en rapproche est le DPI (diagnostic pré-implantatoire), qui n'a strictement aucun lien avec le mariage homo et contre lequel personne ne s'élève, par respect pour les parents confrontés au risque de maladie grave de leurs enfants.
      La PMA avec tiers donneur peut également s'en rapprocher (on ne donne pas ses gamètes ou ses ovocytes si on est porteur d'une maladie génétique ; et on ne donne pas les gamètes d'un noir à un couple blanc, avais-je entendu dans un reportage). PMA qui n'est pas conditionnée par le mariage, faut-il le rappeler.
      Tout ceci n'a aucun lien direct avec le mariage homo et lui préexiste.

      Pour revenir au sujet du billet, auquel vous ne répondez pas, votre propos illustre parfaitement cette violence qui ne se dit pas : dire que le mariage homo ouvre la porte au Meilleur des Mondes et au totalitarisme, c'est violent (et faux).

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    2. La moindre des choses lorsqu'on conteste une argumentation est de faire comme elle : à un argument, on oppose des arguments, à un enchaînement logique, on oppose un raisonnement logique. Donc Claudius, il faudra vous poser la question suivante : est-ce que vous répondez vraiment à la note de Darth_Manu ?

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  8. Bonjour, merci pour ce texte très argumenté que je viens de trouver par l'intermédiaire d'un article publié sur La Vie£.fr. Je partage votre idées selon laquelle laquelle il y aune violence dissimulée de la Manif pour tous.
    J'exprime très succinctement ce point de vue dans deux petits billets.http://icietmaintenantlecorps.blogspot.fr/2013/04/conversation-de-salon.htmlp://icietmaintenantlecorps.blogspot.fr/2013/04/les-falsificateurs.html

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  9. Bonsoir,

    je viens de lire ça :
    http://lobservatoireducoeur.over-blog.fr/article-37-le-secret-de-brokeback-mountain-le-miroir-113099951.html

    je trouve que ce texte fait écho à cette note de Darth Manu.

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  10. Un article vraiment très intéressant et très argumenté.

    Par contre, concernant la prise de distance avec le "Printemps Français", je rappelle que Frigide Barjot a posé avec Samuel Lafont sans aucune réserve sur le sujet. On est d'ailleurs sans nouvelle d'une prétendue plainte contre ce mouvement annoncée par la porte parole de la manif pour tous.

    Par ailleurs il y a ce que l'on pourrait nommer une "condamnation bienveillante" des actes des groupuscules extrémistes. Minimisation de leurs actes, mise en avant d'une répression qui favoriserait ce type d'exactions. Donc finalement une condamnation qui ne condamne pas tant que ça.

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  11. Cher Darth,

    Ce soir, j’ai enfin lu ton billet. Et je suis triste. Non, je n’ai pas réussi à te convaincre. Pas sur le bien-fondé ou non de la loi Taubira bien sûr, je connais et respecte nos différences. Mais que je puisse être autre chose qu’un hypocrite. Car finalement, ton billet semble en conclusion ne me laisser d’alternative qu’entre être un peu faux-cul… ou bien beaucoup. Pourtant, ce n’est pas en tant que catholique que j’ai pris position, mais comme citoyen, en conscience. Personne ne m’a forcé la main.

    A te lire, l’argument de la filiation serait comme le cache-sexe d’une homophobie inavouable et inavouée. Les autres arguments aussi d’ailleurs. Indépendamment du fond, n’est-ce pas une forme de pensée totalisante ? Comme dans le « si vous êtes contre la psychanalyse, c’est la preuve d’une résistance refoulée », ou dans le célèbre et sartrien « tout anti-communiste est un chien » ?

    Tu sais, le fond n’est pas pour moi l’homosexualité mais justement la filiation. C’est la question de l’homosexualité qui masque celle de la filiation, et non l’inverse. Que l’état-civil d’un enfant soit composé de deux personnes de même sexe, ne crois-tu pas que cela puisse questionner, honnêtement ? Et ce indépendamment de l’orientation sexuelle des personnes qui l’élève. Mais je ne suis sans doute qu’un homophobe refoulé, un délinquant de la pensée, puisque l’homophobie est un délit. Tu es du coté du Bien et de la loi, félicitations.

    Et moi hélas, je n’y arrive pas. Je n’arrive pas à considérer que tout se vaut, que l’on peut tout modifier sans conséquences, que les enfants s’adapteront bien. As-tu noté dans les ‘manifs pour tous’ tant de jeunes (et même moins jeunes) dont la famille fut cabossée, et qui en ont justement souffert dans leur cœur ? C’est sûr, cela ne fait ni la Une de France 2, ni celle d’Europe 1, on préfère causer fachos et homophobes.

    Non, je n’arrive pas à être moderne. Peut-être devrais-je dire ‘post-moderne’ en fait ? Une post-modernité où la loi n’a plus pour office de structurer un monde commun, mais de répondre à des revendications selon le rapport de force politique du moment. Un monde fluide où les désirs de chacun sont la seule mesure. Un monde de l’hybris.

    Et pourtant… j’aimerais bien, être du coté du Bien, moi aussi. Mais ça résiste en moi. A l’image du Bartleby de Melville, « I would prefer not to »… Peut-être est-ce justement ma supposée homophobie qui résiste, celle dont il faudrait m’exorciser ? Je n’en suis pas sûr. Plutôt un certain ‘sens commun’, peut-être la « common decency » [1] chère à Orwell et Michéa. Alors oui, je sais la piètre estime que tu as envers le sens commun. Un truc de conservateur crasse. Mais pas seulement. C’est aussi ce qui en chacun résiste à l’emprise des idéologies.

    Ton sans doute délinquant mais néanmoins frère en Christ :),
    Aimé

    PS : un article intéressant et sans parti-pris, qui analyse les faiblesses conceptuelles des arguments déployés par la majorité PS pour défendre le ‘mariage pour tous’ : http://bureau-des-sabotages.ragemag.fr/mariage-pour-tous-pourquoi-la-gauche-na-pas-su-convaincre/

    [1] C'est-à-dire le « sentiment intuitif des choses qui ne doivent pas se faire, non seulement si l'on veut rester digne de sa propre humanité, mais surtout si l'on cherche à maintenir les conditions d'une existence quotidienne véritablement commune » (J.C. Michéa, Impasse Adam Smith, Flammarion, 2006)

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    1. Merci Aimé pour cette réponse sereine et détaillée.

      Elle me semble cependant passer à côté du contenu de mon billet, pour les raisons suivantes:

      - Tu sembles être passé à côté de la distinction que j'y opère entre violence volontaire et violence structurelle. Tu me fais dire que vous êtes des "faux-culs", donc que vous mentez, que votre mobile conscient est la lutte contre l'homosexualité, mais que vous le dissimulez sous de faux prétextes. C'est effectivement ce que je pense de certains, mais mon billet va plus loin. Ce que je dis, c'est que la situation de chacun de nous comme citoyen français au 21ème siècle nous fait hériter de siècles de mise au ban culturelle et sociale de l'homosexualité, et d'une conception hiérarchique des deux orientations sexuelles homosexualité et hétérosexualité. Cette hiérarchie n'a pas existé de tout temps ni en tout lieu. je conteste donc qu'elle soit naturelle. Cependant, elle baigne tellement notre culture et ses représentations que même un grand nombre de défenseurs de droits des homosexuels reconnaissent ne pas toujours réussir à dépasser une forme de révulsion face à desrelations homosexuelles visibles. Je suis certain qu'il y a plein de personnes très bienveillants envers les homosexuels dans la Manif pour, et je te crois très sincèrement quand tu dis en faire partie. Il reste que ce déni d'homophobie de la Manif étonne, au sens, d'une part, où il relègue à une marge extrémiste une vision instinctivement dépréciative de l'homosexualité qui parait au contraire le lot de la plupart d'entre nous, et d'autre part, où il réfute a priori comme une forme de procès d'intention toute interrogation sur le regard, ou les différents regards, des manifestants, alors qu'ils sont très soutenus par des représentants des trois religions abrahamiques, qui condamnent toutes l'acte homosexuel. IL y a la une forme de non dit, comme si le sujet de l'homosexualit en tant que tel était indicible dans le débat public. Cette impression que j'ai est renforcée par le sepectacle peu cohérent des psoitions exprimées dans la Manif sur l'homosexualité. Certains refusent toute institutionnalisation, contrat d'union civile inclus, comme le Père Burgun, comme Philippe Ariño (ce qui correspond à la position officielle de l'Eglise: cf la note de la CDF citée dans mon billet). D'autres , tant que la filiation n'est pas en cause, non seulement acceptent mais revendiquent le contrat d'union civile et une certaine institutionnalisation de l'homosexualité, comme Homovox ou de nombreux manifestants. Clairement, la manif pour tous, sous une apparente unité, réunit des points de vue très diférents, et même antagonistes, sur la question de la reconnaissance sociale et juridique de l'homosexualité,. Pourquoi ne met-elle pas cette question au premier plan, et balaie-t-elle les inquiétudes légitimes de nombreux homosexuels, en les réduisant à des procès d'intention? Sincèrement, j'ai du mal à le comprendre autrement que comme une forme de malaise, divisée qu'elle semble être en tre ceux qui pensent véritablement que l'homosexualité est une blessure ou une maladire, mais ont peur de le dire trop haut, sous peine de subir les foudres médiatiques, et ceux qui sont d'avis contraire, mais qui n'expriment pas franchement cette divergence, refusent finalement ce débat sur la reconnaissance de l'homosexualité demandé par les organisations lgbt, et se trouvent pris, par association, dans une forme de contradiction communicationnelle qui brouille leur message et le rend peu crédible.

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    2. - ta comparaison avec la célèbre citation de Sartre sur le communisme me semble hors sujet. Il ne s'agit pas de souscrire à un modèle politique, mais de poser la question de la reconnaissance de l'homosexualité franchement. Je ne dis pas que toute personne qui n'a pas la même perception de l'homosexualité que moi est un chien. Je dis que toute personne a une perception de l'homosexualité, et, que dans un débat qui touche prioritairement à une revendication par des homosexuels d'une plus grande reconnaissance de leur couple, cette perception doit être mise en débat. En abordant le problème ostensiblement sur le terrain de l'enfant, et en criant à la chasse au sorcières dès lors que les partisans du mariage pour tous recentrent sur la question de la reconnaissance sociale de l'homosexualité, les opposants, je suis désolé de le maintenir, me semblent peu cons"quents, et faire preuve d'un grand manque de considération de leurs adversaireq, et d'une certaine malhonnêteté. Non pas parce qu'ils ont contre la reconnaissance de l'homosexualité, mais parce qu'ils n'assulment pas les implications de leurs prises de position.

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    3. "Que l’état-civil d’un enfant soit composé de deux personnes de même sexe, ne crois-tu pas que cela puisse questionner, honnêtement ? Et ce indépendamment de l’orientation sexuelle des personnes qui l’élève. "

      Ce développement n'a rien à voir avec mon billet. Je reconnais tout à fait que l'on puisse s'interroger. Mais s'interroger, popur moi, ça veut dire laisser toutes les hypothèses ouvertes, pour les examiner tour à tour. Difficile de croire que cela a été la démarche de la plupart des opposants, après toutes ces incantations sur l'"évidence", la prétendue complémentarité des sexes ou la "nature", au mépris de tout ce que la sociologiue, l'anthropologie, l'Histoire, la neurobiologie etc. nous ont appris ces dernières décennies.

      "Mais je ne suis sans doute qu’un homophobe refoulé, un délinquant de la pensée, puisque l’homophobie est un délit. Tu es du coté du Bien et de la loi, félicitations.

      Et moi hélas, je n’y arrive pas. Je n’arrive pas à considérer que tout se vaut, que l’on peut tout modifier sans conséquences, que les enfants s’adapteront bien. As-tu noté dans les ‘manifs pour tous’ tant de jeunes (et même moins jeunes) dont la famille fut cabossée, et qui en ont justement souffert dans leur cœur ? C’est sûr, cela ne fait ni la Une de France 2, ni celle d’Europe 1, on préfère causer fachos et homophobes.

      Non, je n’arrive pas à être moderne. Peut-être devrais-je dire ‘post-moderne’ en fait ? Une post-modernité où la loi n’a plus pour office de structurer un monde commun, mais de répondre à des revendications selon le rapport de force politique du moment. Un monde fluide où les désirs de chacun sont la seule mesure. Un monde de l’hybris. "

      Ne tombes-tu pas là dans le procès d'intention que tu prétends dénoncer: ai-je lancé une injonction à être moderne? Je ne me suis pas contenté de te traiter de "délinquant de la pensée": j'ai fait tout un développement sur la violence symbolique, auquel tu n réponds pas, que tu ne cites même pas. tout ce que tu sembles retenir dans ton commentaire, c'est que j'ai mis en cause ton regard sur l'homosexualité, et que donc je t'ai traité de méchant. tu réponds à la mise en cause, mais pas aux arguments ni aux exemples...


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    4. "As-tu noté dans les ‘manifs pour tous’ tant de jeunes (et même moins jeunes) dont la famille fut cabossée, et qui en ont justement souffert dans leur cœur ?"

      Je les ai notés, de même que ceux dans l'autre sens d'enfants qui ont souffert dans des familles hétéroparentales, et d'enfants heureux dans des familles homoparentales. Cela m'a surtout appris à considérer les témoignages dans leur globalité, en les confrontant, et non seulement en eux mêmes.

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    5. - Il ne m'apparait pas anodin que tu me répondes sur le reproche d'homophobie, mais pas ur la question de ton regard sur l'homosexualité, dans son rapport à la société et à l'Eglise. Tu écris: "Et je suis triste. [...]Mais que je puisse être autre chose qu’un hypocrite. Car finalement, ton billet semble en conclusion ne me laisser d’alternative qu’entre être un peu faux-cul… ou bien beaucoup. Pourtant, ce n’est pas en tant que catholique que j’ai pris position, mais comme citoyen, en conscience. Personne ne m’a forcé la main. " (je passe sur cette cureiuse distinction entre catholique et citoyen, alors que j'avais cru comprendre qu'être catholique n'était pas distinct de la citoyenneté, mais une plus value supposée éclairer cette dernière). Or, j'écris moi-même: "Vous qui êtes sincères lorsque vous dites accepter l'homosexualité comme une orientation sexuelle "normale", et qui ne vous inquiétez que des conséquences du projet de loi sur la filiation, félicitation pour votre capacité à faire la part des choses. " Donc, je reconnais que certains manifestants sont sincères, puis je pose une question, à laquelle tu ne réponds pas. C'est-à-dire que tu me reproche un procès d'intention en bloc, alors que je nuance. Et tu omets la réponse qui te permettrait de le réfuter de la mnière la plus directe. Comme si la question du regard porté sur l'homosexualité avait moins de substance, de réalité que le regard porté sur les hétérosexuels portant un regard sur les homosexuels. Comme si sur une question pourtant directement lié à l'homosexualité, celle-ci devait s'effacer devant les interrogations propres aux hétérosexuels. Voilà qui me parait, plutôt qu'une réfutation, une illustration de cette violence symbolique dont mon billet traite. Et certes, cela ne correspond pas à une violence de ta pensée ou de ta perception volontaire, consciente de l'homosexualité. Car précisément, il ne s'agit pas d'une violence volontaire, mais structurelle. Les manifestants évacuent comme une question périphérique, minimise, celle de la rennaissance de l'homosexualité, alors que des homosexuels sont chaques jours confrontés à des discriminations et des phénomènes d'exlusion, parfois au sein de leur propre famille. Et sans être nécessairement des faux culs, tout en aimant très sincèrement, sur le plan individuel, des homosexuels, vous écartez cette question au nom de celle de la filiation, comme si elle était périphérique, comme si elle n'était pas si grave. Et c'est ultra-violent, d'un eviolence faite en toute bonne conscience et sincérité (je ne crois pas que la plupart d'entre vous soyez des faux culs), mais qui est d'autant plus excluante et odieuse pour ceux qui la vivent...

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    6. Voilà, désolé pour le caractère un peu sec de ma réponse, qui n'enlève rien à l'estime que j'ai pour toi, d'apèrs ce que tu m'as fait connaitre au fil de nos échanges sur facebook et sur twitter. Je suis juste un peu déçu que tu t'attardes sur le seul caractère formel de mise en cause de mon billet, sans revenir véritablement sur les arguments, concepts et exemples que j'y développe. et sans répondre aux questions que je t'y pose, ainsi qu'à tout manifestant, directement (j'en viens d'ailleurs à me demander, pas nécessairement en rapport avec toi d'ailleurs, si le mot homophobe n'est finalement pas devenu une plus grande commodité pour les opposants au projet de loi que pour se spartisans, au sens où se plaindre de se faire traiter d'homophobe devient un moyen bien pratique d'éviter de répondre à toute question sur le regard porté sur l'homosexualité et les homosexuels). Je remets donc ci-dessous celles qui semblent davantage te concerner, afin que tu puisses y répondre (et je rappelle préalablement que même citoyen, tu restes catholique, et que séparer ces deux dimensions de ton identité ne me parait pas avoir de sens):

      "Vous qui êtes sincères lorsque vous dites accepter l'homosexualité comme une orientation sexuelle "normale", et qui ne vous inquiétez que des conséquences du projet de loi sur la filiation, félicitation pour votre capacité à faire la part des choses. Si vous êtes catholiques (ou d'une autre religion condamnant l'homosexualité) comment assumez-vous cet écart entre votre opinion intime et ce que vous dit l'Eglise? Pourquoi fait vous comme si vous étiez sur la même ligne qu'elle alors que vous êtes en désaccord avec son enseignement? Quel regard devrait être pour vous celui de l'Eglise sur l'homosexualité, et que comptez-vou faire pour faire connaitre et mettre en débat votre conviction?"

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    7. Cher Darth,

      Merci de ta réponse détaillée et désolé de t'avoir un peu déçu. Concernant le fond, ton interpellation finale, je pensais en fait y avoir déjà répondu sur mon blog. A travers par exemple des billets comme :

      « Chaque catholique pratiquant a sans doute maintenant choisi son camp, dans ce conflit imposé. En conscience. Et chacun a bougé je crois dans cet épisode. Pour reconnaître le désir homosexuel comme une réalité ; et qui n’est pas en soi mauvaise. Reconnaître l’engagement fidèle entre deux personnes de même sexe comme plus humanisant que des aventures sans lendemain. Reconnaître que la place dans l’Eglise de ceux qui font ce choix pose question. »
      in http://lmvid.blogspot.fr/2013/04/sos-debat.html

      ou encore :

      « Ceux qui sont pour donnent aussi de la voix et heureusement : les catholiques ne sont pas un bloc monolithique, nos convictions sur ces sujets sont une subtile alchimie entre foi, religion, politique, expérience, sagesse... Mais quand cette bataille sera terminée, restera la mission propre de l'Eglise. Restera la responsabilité des âmes, restera l'appel vers la vie éternelle. Restera à écouter, pour pouvoir ensuite appeler avec justesse. Ecouter ceux qui se demandent quelle est dans notre Eglise la vocation des personnes qui se ressentent homosexuelles. Ecouter par exemple cette interpellation :
      "lorsque le sujet de l'homosexualité est abordé par des représentant de l'Eglise c'est extrêmement majoritairement pour être CONTRE quelque chose. Contre le pacs, contre mariage, contre l'homoparentalité, contre les relations sexuelles. Que ces interpellations soient légitimes ou pas on peut se demander où sont les prises de parole positives... Pour l’accueil, pour l'accompagnement, pour le vivre ensemble, pour la protection de ceux qui souffrent..."
      in http://lmvid.blogspot.fr/2013/01/la-misericorde-pour-tous.html

      Sinon personnellement, je dissocie foi et citoyenneté, ce qui est à Dieu et à César... Bien sûr, la foi nourrit mon discernement politique ou social, mais ne le conditionne pas. Aurai-je tort ?

      Je ne sais pas si tu as eu l’occasion de lire le texte que j’indiquais en PS : http://bureau-des-sabotages.ragemag.fr/mariage-pour-tous-pourquoi-la-gauche-na-pas-su-convaincre/
      Il m’a semblé très pertinent, et expliciter une absurdité que je ressentais sans la nommer. Des slogans comme « nous aussi on veut pouvoir divorcer » prennent une nouvelle saveur à sa lecture. L’auteur mentionne Sartre, d’ailleurs :)

      Bien à toi,
      Aimé

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  12. Je m'étais juré de garder le silence sur le débat... Mais une furieuse démangeaison de mes petits doigts m'a pris, et elle s'est accrue lorsque j'ai lu le commentaire d'Aimé. Pourtant lors du dernier sermon que jai écouté, Monsieur le Curé a bien insisté sur l'importance du silence das la vie du chrétien. Ce petit muscle de la langue peut faire des ravages (et sur le web, les petits doigts..). Je me suis donc essayé a bien faire tourner ma langue 7 fois dans ma bouhe avant d'intevenir.

    Je trouve, Cher Manu, que tu compliques grandement les choses. Je dois te l'avouer, je penses que le débat (qui n'a pas eu lieu, on est assez d'accord là dessus) est en réalité beaucoup plus simple que ça.
    Il n'y a pas eu de débat, parce qu'on se fout royalement de ce que plus d'un million de personnes s'étant déplacées dans la rue contre ce projet de loi peut penser. J'étais à la première manifestation (avec les gros vilains de Civitas, d'ailleurs!). Je me suis refusé d'aller à la deuxième. C'était, à mon sens, la première manifestation qui était essentielle. Le bon peuple de France attendait une réponse de Monsieur Hollande, Madame Taubira et comparses. Qu'en fut il ?
    Néant. On s'est contenté de dire qu'il y avait quelques opposants au projet de loi qui ont saccagé au passage le champ de Mars, et à qui la Mairie de Paris a eu l'obligeance d'envoyer la facture. Aucune considération pour ces manifestations... Aucune reconnaissance, si ce n'est un mépris à peine voilé. C'est digne des Kmers Rouges, et j'exagère à peine! Mon frère est allé à la deuxième manifestation. Et le moins qu'on puisse dire, ce que ce n'est pas un violent. Il est passé au mauvais endroit au mauvais moment. Matraqué, gazé, avec en prime une envolée géniale du CRS montrant finalement, tout ce que représente cette manifestation pour le pouvoir en place: "Voila pour toi, sale catho!!!"
    "Homophobie ?" penses tu ? En tout cas, "cathophobie" et "foutage de gueule", certainement!
    Je vais donc dire tout net le fond de ma pensée : les homosexuels n'étaient qu'un prétexte. Je trouve même d'alleurs scandaleux cette prise d'otage par le système en place, parce que la vérité, c'est que d'eux aussi, ils s'en foutent. La vérité, c'est que l'objectif était de détruire le reste de la structure familiale traditionnelle, la bonne vieille structure patriarchale traditionnelle. Voici qui est aujourd'hui fait, et de la façon la plus scandaleuse possible. Aucun pouvoir en place, de mémoire de l'histoire de la république française n'avait osé faire ce coup d'Etat. En 1969, de Gaulle démissonne après l'échec du referendum. En 1984, Monsieur Mittérand fait machine arrière devant l'opposition des enseignants sur la réforme de l'enseignement libre. Monsieur Hollande n'en a cure. Il a même usé de subterfuges subtiles pour encadrer cette manifestation en prétextant devoir ce jour là (comme par hasard), déclarer la guerre au Mali, comme si cela ne pouvait pas attendre le lendemain! Monsieur Hollande avait donc d'autres chats à fouetter que de s'occuper et d'écouter son bon peuple de France ce jour là, bien entendu. Quelle honte!!!
    Alors, Cher Manu, je crois quelque part que Aimé a raison : nous sommes pris pour des homophobes, alors qu'on est des catholiques, et sous le faux prétexte de cette homophobie, on crache délibérément sur la conception chrétienne du mariage. Je crois sincèrement que c'est ce qu'Aimé regrette, ainsi que moi-même, et que tu ne dis pas. C'est pourtant je pense, pour nous ce qu'il y a d'essentiel, et tu es passé à côté.

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  13. Merci pour ce billet intéressant.
    Si personne ne se fait trop entendre sur ce sujet c'est aussi, sans doute, une question d'image et de... marketing ? Ce commentaire pêché sur un forum catholique l'illustre bien :

    "Pensez aux personnes qui n'ont pas trop d'avis sur ces sujets. Si on leur présente le projet de loi comme une atteinte à la famille, ils seront beaucoup plus réceptifs que si on leur présente les choses sous l'angle de l'acte homosexuel, tant la propagande homosexuelle culpabilisante est à l'oeuvre."

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    1. Bien résumé ! Depuis le début, c'est ça : je l'ai entendu moi-même sur des médias type Radio Courtoisie (radio d'extrême-droite). L'enfant & le code civil ne sont que des alibis pour faire monter une opposition CONTRE la reconnaissance officielle de l'homosexualité par la société. En fait, on aurait simplement amélioré le Pacs ou créé un simple contrat d'union civile avec un joli nom reconnaissant juste l'union de 2 personnes homos sans histoire d'enfants et le reste, ça aurait été EXACTEMENT PAREIL ! Le même bazar & la même intolérance.


      Darth Manu a raison en parlant de violence : tout ça n'est qu'une histoire de discrimination mais surtout de ségrégation plus ou moins consciente. Beaucoup de cathos, surtout à droite, me font penser avec toute leur condescendance (ah tous ces efforts pour essayer d'accepter la réalité homo !) à tous ces racistes de l'Apartheid ou du sud des USA : on aime bien le gentil "PD" surtout qd il se cantonne à un rôle de "folle" qui fait rire & reste bien à la place qu'on lui a indiquée : être le fou, le monstre de foire, qui nous rassure sur nos propres choix & nos préjugés. Le tout pensé sans même avoir conscience de rabaisser et de blesser l'autre différent tant la certitude d'être supérieur dans son mode de vie rend aveugle et orgueilleux. On n'est vraiment plus ds le langage de l'Amour chrétien là !

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  14. 2 commentaires :

    1/ Une violence cachée, une violence tue, une violence non manifestée, ce n'est pas de la violence, ce n'est qu'un fantasme qui dépeint l'adversaire comme quelqu'un de violent pour mieux le déprécier. Les veilleurs, ce sont des violents ?

    2/ En ce qui concerne l'homophobie et ses multiples sens ((1) discrimination envers une personne, (2) jugement sur un désir, (3) jugement sur un comportement et des pratiques, (4) jugement sur des "droits" accordés à des couples, etc.).

    Vous avez mis le doigt sur le problème de langage : un seul mot pour désigner au minimum 4 concepts différents !!

    C'est comme s'il y avait un seul mot pour désigner (1) l'antisémitisme, (2) l'antisionisme, (3) l'opposition à la politique israêlienne, (4) la solidarité avec le peuple palestinien, et que le mot choisi pour désigner les 4 concepts soit "antisémitisme" !!

    Quand le vocabulaire est si pauvre, il ne faut pas s'étonner que les débats soient si courts, d'autant plus que cette "homophobie" est réprimée par la loi. Quel coup de génie des lobbies LGBT d'avoir choisi cette "matraque idéologique" !

    Tiens, j'ai écrit "matraque idéologique" : la violence ne serait pas plutôt de ce côté-là ?

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    1. assez d'accord!

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    2. "Une violence cachée, une violence tue, une violence non manifestée, ce n'est pas de la violence, ce n'est qu'un fantasme qui dépeint l'adversaire comme quelqu'un de violent pour mieux le déprécier. Les veilleurs, ce sont des violents ?"

      Ah oui? Et les employés qui se suicident au travail sont des dépressifs paranoïaques, et rien à voir avec certaines pratiques de management? Les femmes qui déprécient leur physique et se soumettent à des régimes excessifs ou des procédures chirurgicales abusives, ce sont juste des complexées, et il n'est nul besoin de remettre en cause des modèles de hiérarchisation sociale, voire professionnelle, à partir de l'apparence physique? Nous constatons tous les jours des violences structurelles, qui ne sont pas constituées par des agressions directes ni même conscientes, qu'elles soient physiques ou psychologique, mais qui hiérarchisent les individus sur la base de critères sociaux, qu'il s'agissent de l'apparence physique, de l'orientation sexuelle, des habitudes vestimentaire, et qui créent des situations d'exclusion pas nécessairement voulues, mais de fait, et qui font souffrir de manière très concrète de nombreuses personnes. Pour un exemple très parlant de cette violence structurelle, qui ne réside pas seulement dans les excès d'une petite minorité, mais dans l'attitude de laisser-faire et de minimisation de la majorité par rapport aux agissements de cette dernière, lisez le dossier sur le sexisme chez les geeks de Mar Lard que je linke dans le billet ci-dessus.

      Je ne vous connais pas et je ne doute pas de vos bonnes intentions, mais je me permets de vous faire remarquer que soutenir qu'une violence qui n'est pas manifeste n'existe que dans la tête de ceux qui s'en disent victimes, c'est quand même l'excuse universelle des harceleurs. Et en niant a priori toute violence à partir du moment où elle ne se voit pas, vous ajoutez, bien involontairement j'imagine, de l'eau à leur moulin. Ce qui est grave.

      Pour ce qui est des Veilleurs, j'ai des amis dans leurs rangs, et je ne doute pas de leur bonne volonté. Mais il décrivent comme un acte de résistance pacifique la défense d'un discours qui classifie de fait, sans réel fondement sicentifique, l'homosexualité comme une déviance. J'ai des connaissances homosexuelles qui n'arrivent même plus à regarder les nouvelles, tellement cet affront qui leur est infligé leur est insupportable. Comment nier que cette caution souriante et "joyeuse" d'une hiérarchisation sociale et juridique de fait entre les individus n'exerce aucune violence? Tant d'insouciance et d'inconséquence de la part des eilleurs me laisse sans voix...

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    3. "Vous avez mis le doigt sur le problème de langage : un seul mot pour désigner au minimum 4 concepts différents !!"

      Euh, et alors...? En quoi la polysémie d'un mot disqualifie-t-elle la pertinence de telle ou telle de ses significations, ou celles-ci dans leur ensemble? Avec ce genre d'arguments, on peut jeter à la poubelle 90% facilement des mots de la langue française...

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  15. (1/2)
    Cet article a le mérite de mettre en évidence des points sur lesquels il faut amorcer des réflexions. Sur les rapports entre culture et nature, existence de la nature, ce qu'elle est, la culture peut-elle exprimer une vérité de nature? si c'est le cas il faut que ce soit conscient et mis en évidence par une véritable réflexion sur la nature. Toute influence culturelle entraine-t-elle une symbollique de rapport de force? (auquel cas il faut briser le symbole en trouvant son fondement anthropologique et, s'il n'y en a pas et ne présente aucun intérêt objectif pour le bien commun, s'en délivrer). Une fois qu'on a répondu à ces questions il faut l'appliquer à la question de l'homosexualité. Il y a aussi ici nécessité d'une reflexion sur ce qu'est la violence, je ne suis pas sûr d'être d'accord avec toutes ces définitions.

    De fait, toutes ces réflexions ne sont pas beaucoup mises en évidence, vous avez raison de le dire. Cedébat n'est pas sur le devant de la scène. Pour des raisons pratiques sûrement, notamment parce qu'au sein de la manif pour tous se trouve une grande diversités de sensibilités, de milieux sociaux, de convictions, d'idées. Si on prend l'exemple des idées politiques, ils ont quand même réussi à faire défiler dans la même manifestation un trotskiste et un élu du FN.

    Alors parmi cette grande diversité, on fait un consensus, on avance des arguments avec lesquels tout le monde au sein de la manif est d'accord. Or ces arguments, j'en ai la conviction, sont valables, et ne sont pas homophobes. Ils insistent sur la filiation, le bouleversement sociétal qu'implique cette loi, et le droit de l'enfant. Ils visent le bien commun, représentent un nombre impressionnant de personnes qui s'opposent à la loi, ils méritent donc d'être écoutés avec attention et sans condescendance. Ils se nourrissent aussi de l'opposition à la théorie du gender et à l'égalitarisme abusif qui nie la toute différence existante. (d'ailleurs comment pouvez vous dire que le gender n'existe pas? il est enseigné au lycée, est ou sera enseigné à l'école dés l'age de six ans, et est défendu par des écrivains trés connus et influents comme Judith Butler, qui pousse le gender à l'extrème, allant avec le "queer" jusqu'à la négation ultime de la sexuation). En tout cas, procès d'intention ou pas, le débat que vous levez a son intérêt et sa nécessité, mais ne peut pas servir d'argument dans le cadre de la loi dite "mariage pour tous".

    Certains placent peut-être une hiérarchie entre les relations entre hétérosexuels et entre homosexuels (je dit relation et non sexualité ou relations sexuelles: pourquoi se sentir toujours obligés de ramener tout à la sexualité, une relation d'amour ne se limite pas à ça). Parmi eux il semble que certains se font violence (pardonnez la formulation) en acceptant de sacrifier dans ce débat leurs convictions au consensus contenant des arguments auquels ils adhèrent, d'autres sont hypocrites, d'autres encore ont préféré pendant les premières manifestations manifester séparément, et enfin d'autre ne pensent absolument pas ça comme vous l'avez si bien dit. D'ailleurs ils sont la preuve qu'il n'est pas nécessaire d'avoir un tel discours pour tenir les propos de la manif pour tous, ça aussi, je crois que vous le concédez.

    Pas de violence physique, sauf en marge des manifs, pas de violence psychologique dans les arguments de la manif, les manifestants ne sont pas violents psychologiquement envers les homosexuels, si ce n'est involontairement. Quand aux violences que vous dites induites par la culture, par le symbolisme, je ne pense pas qu'elles soient omniprésentes, en tout cas elles ne prouvent rien quand à l'illégitimité des arguments de la manif pour tous, et par conséquent quand à la mobilisation qu'elle représente.

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    1. "Alors parmi cette grande diversité"

      Cette "grande diversité", de mon point de vue, c'est quand même une immense majorité de catholiques, avec quelques cas atypiques à la marge, comme beaucoup de gros rassemblements. La normalisation de l'homosexualité reste très récente et toute relative. Qu'on retrouve contre elle des nids de résistance dans la plupart des sensibilités politiques traditionnels (et Dieu sait combien les trotskistes sont loin d'être toujours progressistes sur les questions sexuelles) n'a rien d'étonnant, et n'apporte pas à mes yeux une forme de légitimité du nombre à la Manif pour Tous.

      "Or ces arguments, j'en ai la conviction, sont valables, et ne sont pas homophobes."

      Je ne dis pas que tous ces arguments sont homophobes par nature. Par contre, j'estime que la question de la place des homosexuels dans notre sociétés devait être posée clairement par les opposants au projet de loi, et qu'ils l'ont clairement esquivée. D'autre part, c'est bien beau d'évoquer la question de la filiation ou la "complémentarité" des sexes. Le problème, c'est que ces mêmes opposants qui ne cessent de réclamer un "débat" à leurs adversaires se sont contentés de les brandir comme des "évidences" intangibles et incontestables, au mépris des remises en causes du modèle familial ocidental en Histoire, anthropologie, sociologie, etc., qui sont nombreuses, et, là encore, esquivées... Ce procès que vous faite aux études sur le genre, sous le nom erroné de "théorie du gender ", me parait assez représentatif. Par exemple, pour lire ces derniers temps plusieurs livres de Judith Butler, je peux vous dire qu'elle ne nie pas toute sexuation (notamment, le drag queen ne s'abstrait pas par un simple effort de volonté de son sexe d'origine, mais au contraire, met en scène par son travestissement délibérément exagéré l'écart entre sa tentative et à la fois l'objectif désiré (être une femme) et son origine biologique, et invite à penser par cet écart les soubassements culturellement construits de notre compréhension de la différence des sexes: http://cafaitgenre.org/2013/01/09/judith-butler-meilleure-alliee-du-neo-liberalisme/) et se borne à mettre en évidence les implications culturelles et sociales de notre compréhension de celle-ci, pour permettre de réfléchir sur les enjeux de pouvoir qui en découlent au quotidien (la prétendue moins grande émotivité des hommes, par exemple).

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    2. "Parmi eux il semble que certains se font violence (pardonnez la formulation) en acceptant de sacrifier dans ce débat leurs convictions au consensus contenant des arguments auquels ils adhèrent"

      Ils se sont du moins fait violence tant que cela leur était tactiquement utile et qu'ils espéraient un recul du gouvernement ou des parlementaires. Maintenant que la loi est votée, on assiste depuis quelques jours à un retour en force des condamnations de l'union civile et de la condamnation de l'homosexualité comme une déviance. Il n'y a qu'à lire les propos récents de Guillaume de Prémare ou encore constater le traitement récent de Frigide Barjot à Lyon.

      "Quand aux violences que vous dites induites par la culture, par le symbolisme, je ne pense pas qu'elles soient omniprésentes, en tout cas elles ne prouvent rien quand à l'illégitimité des arguments de la manif pour tous, et par conséquent quand à la mobilisation qu'elle représente."

      Il ne s'agit pas de dire qu'elles sont omni présentes, mais de rappeler qu'elles existent, que les arguments, même éventuellement légitimes par ailleurs, de la Manif pour tous, ont pour effet de les naturaliser et les rendre invisibles, et uqe ce problème arait dû être abordé de front, explicitement. Qu'il est été purement et simplement esquivé conduità mettre en doute la bienveillance des manifestants envers les revendications de homosexuels à moins de idscriminations et à une plus grande reconnaissance.

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    3. "pourquoi se sentir toujours obligés de ramener tout à la sexualité"

      Dans la cadre de la remise en cause d'une hiérarchisation sociale et juridique suivant la nature de la relation et/ou de l'orientation sexuelle, ça me parait dur à éviter. C'est précisément la revendication des LGBT que les homosexuels reçoivent la même reconnaissance pour leur couple indépendamment de l'orientation sexuelle, et leurs contradicteurs qui ramènent le débat à la différence de la relation sexuelle (mêmes sexes vs sexes "complémentaires"

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  16. (2/2) Quelques remarques pour terminer: vous dites que les définitions d'homophobie ne sont pas du novlangue, mais il y a bien quelque chose de similaire puisqu'on change le sens d'un mot, ce qui a pour effet d'altérer, de modifier, de transformer la compréhension que l'on a de la chose. On ne cherche pas le véritable sens du mot mais on lui donne une efficacité au service d'une idée ou d'une idéologie.
    Ensuite, je pense que la revendication de la manif pour tous n'est pas de refuser un droit: le mariage est une institution, pas un droit, et la loi dite "mariage pour tous" a pour effet de modifier la définition du mariage (le dictionnaire Larousse l'a déjà fait), donc de changer le mariage dans sa réalité juridique. En tout cas, le mariage n'étant pas un droit, personne ne veut enlever des droits aux homosexuels, à part peut-être quelques dangereux extrémistes. Certains prétendrons que cette distinction est fausse mais personne ne peut dire que c'est de l'hypocrisie de ma part.

    J'aurais aimé mieux structurer et étayer mon commentaire, mais je manque de temps. Je salue la sérénité de ce débat.
    cordialement.

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    1. " mais il y a bien quelque chose de similaire puisqu'on change le sens d'un mot"

      Ce mot a été créé pour décrire cette violence symbolique. Nul changement donc. Par ailleurs, je ne vois quel problème soulèverait une redéfinition plus extensive, à partir du moment où elle est étayée.

      "personne ne veut enlever des droits aux homosexuels"

      Quand il s'agit de minorités longtemps discréditées, comme c'est le cas pour les homosexuels, il me parait clair que la question ne peut se limiter à: ne pas leur retirer de droit. Encore une fois, leur lutte est une lutte pour la reconnaissance, pour être perçus comme "normaux". Et en cherchant à limiter au maximum cette institutionnalisation de la relation homosexuelle, c'est bien cette reconnaissance que la Manif pour Tous leur dénie.

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  17. Merci à tous pour vos réactions. J'essaierai d'y répondre en détail demain ou après-demain.

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  18. Non violente, la lettre de l'évêque du Havre ?

    http://www.eglise.catholique.fr/conference-des-eveques-de-france/textes-et-declarations/message-aux-catholiques-apres-la-loi-sur-le-mariage-et-l-adoption-16483.html

    Notamment les points 3 et 4 : c'est non violent d'affirmer que l'ouverture de l'adoption aux couples homos induira nécessairement qu'on leur mente, qu'on "brouille la lisibilité des origines", qu'on "fabriquera les enfants comme un dû" ?
    C'est non-violent d'affirmer que l'ouverture du mariage aux couples de même sexe nie leur "différence" et empêchera leur épanouissement ?
    C'est non-violent de féliciter les opposants actifs, et de ne pas écrire un mot pour les autres, pour ceux qui ont douté, pour ceux qui, quoiqu'opposants, ont douté devant les formes de la mobilisation, et surtout pas pour ceux qui étaient pour la loi... ?

    Je suis désespérée, là. Sérieusement. La tribune récente de Mgr Dagens m'avait un peu rassérénée, malgré les discours concomitants et désastreux de Mgr Aillet et de l'évêque de Metz, mais là, ce texte en première page du site de la CEF comme document de référence pour "poursuivre la réflexion et les actions concernant les questions sociétales", c'est une grande claque dans la tronche.
    Je suis sensée animer la messe de Pentecôte dimanche, autant vous dire que je ne suis pas top motivée (et pourtant j'ai un curé formidable...).
    ps : Darth Manu, je vous ai envié en lisant que vous partiez pour Taizé. Cela fait bien longtemps que je ne suis pas allée sur la colline.

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  19. Tu dis franchement ce que tu veux Manu, et franchement j'accepte tout d'habitude...
    Mais là... là... c'est long... beaucoup trop long...
    :-D
    Comment veux-tu que quelqu'un lise cela sur l'Internet, il faut au moins 1/4 d'heure !

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  20. Merci Darth Manu pour ce magnifique réquisitoire.

    A mon sens, on ne met jamais assez en avant les nombreuses incohérences des "antis" qui prétendent défendre SEULEMENT les interêts des "enfants innocents et vulnérables".
    Ainsi cette loi Taubira changerait radicalement les régles de la filiation ? Priverait les pauvres petits nenfants d'un Papa ou d'une Maman ?
    Mais où étaient-ils depuis presque 40 ans tous ces acharnés défenseurs, alors qu'en 1966 la loi a institutionnalisé l'adoption telle qu'on la connait aujourd'hui, c'est-à-dire possible par des célibataires ! A preuve que la dualité des roles modèles n'était pas si indispensable qu'on le dit aujourd'hui.

    Ou étaient-ils ces défenseurs, pour condamner l'accouchement sous X, qui prive LEGALEMENT l'enfant de sa filiation biologique, et de père et de mère ?

    Ou étaient-ils ces défenseurs de "l'institution sacrée du mariage", lorsque Sarkozy (qui pour rappel a divorcé 2 fois, et s'est remarié 3 fois, dont la 3me par un maire farouchement opposé à célébrer des mariages homos, mais qui ne trouve rien à redire à marier le même homme pour la 3me fois...) a encore facilité les procédures de divorce ?

    Ou étaient-ils ces défenseurs, pour condamner la "fabrication des enfants" qui existent depuis 40 ans pour des couples hétérosexuels stériles qui ont un "égoiste désir d'enfant" totalement en contradiction avec leur "stérilité naturelle" ?

    Bref, toutes leurs "absences" démontre assez que leur véritable obsession n'est pas la "protection des enfants", mais bien la croyance "chevillée au corps" que les homos sont incapables d'assurer le même potentiel de développement équilibré d'enfants, dans l'amour et la générosité.

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  21. Sinon, très bonne analyse politique (exclusivement) de mon pote Marc Crapez sur le phénomène "Manif pour tous", dans Atlantico.

    Un peu d'air

    http://www.atlantico.fr/decryptage/rejet-satisfaction-immediate-besoins-marchandisation-corps-et-defense-reperes-traditionnels-radiographie-cette-france-qui-veut-d-737162.html

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  23. Victime de la violence symbolique2 juin 2013 à 00:51

    Magnifique rappel de la définition de la violence symbolique par Pierre Bourdieu dans votre article.

    Cette violence symbolique s'est en effet exprimée de manière explicite lors des manifs pour tous.

    Ils ont été niés, vilipendés, méprisés, moqués, regardés avec condescendance, parfois même pris à parti avec violence physique. Et cette violence verbale qui s'étalait dans les médias contre eux ! Franchement incroyable dans une société moderne comme la France.

    Qui, ils ? Les homos ? ce n'est pas à eux que je pensais, il faut bien avouer.

    Ce sont les manifestants qui ont été victimes de cette violence symbolique (de moins en moins symbolique, d'ailleurs, en ce moment) par la plupart des médias et par la classe politique dominante, bref par les élites.

    Et ils en ont été meurtris.

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    1. Bravo pour ce beau projet de retournement, qui force l'admiration! :-)

      Je suis impatient de lire votre prochain commentaire, qui en apportera la démonstration; cette dernière étant, je vous dois de le dire, pour l'instant tout à fait défaillante... ;-)

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  24. Excellent post. Je ne t'adresserais qu'une critique : tu fais une généralité de l'idée que "les religions abrahamiques" rejettent l'homosexualité. Or, c'est beaucoup plus complexe que ça, et ce pour deux raisons :

    1. La première, c'est qu'il existe de nombreux individus qui se reconnaissent de ces religions et qui ne voient rien de mal ou de désordonné dans l'homosexualité. Moi le premier : catholique pratiquant, je me suis opposé à mon Église sur cette question, et je l'ai fait ouvertement. Mon blog est rempli de posts où j'ai expliqué en long, en large et en travers pourquoi j'étais favorable non seulement à la loi Taubira, mais encore au sacrement du mariage pour les couples homos. Plus encore (car plus difficile, même si moins utile et moins efficace), je ne me suis pas tu au sein de ma paroisse ; au contraire, j'y ai très clairement dit ce que je pensais (même à la télé locale !), et je n'ai pas hésité à entrer en conflit avec des amis pour défendre mes idées.

    Bon, tu vas me dire que ça reste individuel, et que les institutions, elles, condamnent l'homosexualité. D'où mon :

    2. Pas du tout ! Il y a aussi des institutions, parmi les "religions abrahamiques", qui acceptent tout à fait l'homosexualité, voire célèbrent des mariages homosexuels. C'est le cas, par exemple, de l’Église de Suède.

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  25. Il paraît que votre article est célèbre, je ne le découvre que aujourd'hui. Excusez de ne l'avoir parcouru qu'en diagonale : manque de temps. Moi aussi, j'aimais bien la musique metal, par contre, autant vous le confesser de suite : je ne suis pas croyant, et après y avoir beaucoup réfléchi. Ce qui ne m'a pas empêché d'avoir bien des amis, et des meilleurs, qui soient catholiques ou musulmans, voire juifs ou orthodoxes, très peu de protestants. Ce n'est donc pas Dieu qui me fait rigoler comme une poêle à frire de cette absurdité qu'est le mariage entre deux hommes ou entre deux femmes.
    J'ai suffisamment parcouru votre texte pour conclure que si l'on prend les postulats que vous adoptez, on ne peut qu'en arriver à valider le mariage gay, la procréation hospitalisée et les mères-porteuses. Bien sûr, je ne le fais pas. C'est-à-dire que je ne crois ni en Dieu ni en "l'homosexualité" qui a été inventée en Hongrie à la fin du XIXe. Et pas davantage à "l'hétérosexualité" imaginée en même temps (la "normal-sexualité" ayant même été son nom de baptême). Bien sûr qu'on peut s'amuser avec ses organes sexuels avec quelqu'un de son sexe ou de l'autre, et même les deux en même temps ; de là à considérer qu'il en résulterait une essence de l'individu, que celui-ci serait ceci ou cela parce qu'il fait ceci plutôt que cela, ce n'est une classification sociologique arbitraire qui ne change rien à la nature physique - la seule qu'un non-croyant considère - de l'individu. Et encore moins à sa catégorie sociale. Les goûts et les couleurs ne transforment pas l'être d'un amateur.
    L'absurdité majeure du mariage gay, c'est de prendre l'institution symbolique du patriarcat, le mariage procréateur, pour marier des inféconds (Louis XIV est criminel de ce côté-là !). Je n'y vois rien d'amoral, c'est juste complètement stupide. Donc bien humain, me direz-vous.
    Autre postulat que je rejette absolument, c'est cette stigmatisation de la violence symbolique. Je ne veux pas d'un monde castré (métaphoriquement, physiquement ça m'est égal) de bisounours. J'ai fait beaucoup de luttes sociales - contre la réforme des retraites, celle du statut des intermittents, l'intervention au Kosovo, etc. -, la violence symbolique est légitime, saine et indispensable, je l'ai employée et la réemploierait tant que je pourrais pour blesser, abattre, tuer symboliquement, l'adversaire politique. Une société qui renoncerait à cette vie-là est une société morte.
    J'ai détesté la fréquentation des Manif Pour Tous à cause de cette bondieusesque appréhension à entrer dans la lutte franchement ; beaucoup trop de gens gentils dans ces cortèges, pas assez de combattants. Oui il faut condamner le manque de violence de ces manifestants.

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  26. Désolé, c'est "réemploierais" pas "réemploierait". :(

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