jeudi 15 août 2013

Etudes de genre et théologie du corps: considérations préliminaires 1/3


Avertissement: quand je parle, dans cette série de billets, de "théologie du corps", je fais uniquement référence à celle élaborée par Jean-Paul II (puisque, comme Maïeul Rouquette me l'a fait très justement remarquer sur Twitter, il en existe bien d'autres, parfois très différentes dans leur contenu, y compris des théologie du corps queer).

Lutter, désormais quasi quotidiennement, contre les idées fausses et les amalgames qui se répandent en milieu catholique sur les études de genre, peut faire oublier que, derrière ce qui pourrait sembler être une succession de malentendus, se joue la rencontre entre ce que nous apprend ce champ de recherche sur les différences H/F, la sexualité, les pratiques liées à celle-ci, et ce qu'enseigne l'Eglise a ce sujet, qui, loin de se résumer à l'héritage culturel, et jamais remis en question, d'un lointain, passé, a subi il y a quelques décennies un lifting en profondeur. Celui-ci  a pour conséquence que beaucoup de catholiques s'estiment autorisés à juger que l'Eglise, loin d'être archaïque et réactionnaire, dispose d'une pensée sur ces sujets à la pointe de la modernité, et qui intègre les avancées principales des luttes féministes du XXème siècle, tout en corrigeant ce qu'ils estiment en être les "excès". Il s'agit de la "théologie du corps", dont le Cardinal Wojtyla a jeté les fondements dans ses travaux philosophiques et théologiques (notamment les livres Personne et acte et Amour et responsabilité), et dont il a délivré la substantifique moelle, une fois devenu le Pape Jean-Paul II, dans des audiences, donnée le mercredi, et devenues célèbres, qui s'étalent entre le 5 septembre 1979 et le 28 novembre 1984.

Selon les termes de Georges Weigel, biographe de Jean-Paul II:

"Il se peut que la théologie du corps de Jean-Paul II, source de controverses, ne soit prise en compte que lorsque lui-même aura quitté la scène. Ensemble, ces cent trente discours catéchistiques constituent une sorte de bombe à retardement théologique qui pourrait exploser, avec des effets spectaculaires, au cours du troisième millénaire de l'Eglise. Quand cela arrivera, peut-être au XXIème siècle, la théologie du corps sera probablement regardée comme un tournant non seulement de la théologie catholique, mais aussi de l'histoire de la pensée moderne." (cité par Yves Semen dans La sexualité selon Jean-Paul II, Presses de la Renaissance, 2003, p. 63-64).
Cette citation permet de prendre conscience de l'extrême fierté qu'inspire chez nombre de catholiques la pensée de Jean-Paul II sur la sexualité, et d'entrevoir pourquoi les acquis des études de genre, qui remettent en cause, de manière profonde, certains des présupposés essentiels  de cette théologie du corps, sont accueillies avec tant de scepticisme et d'hostilité.

L'originalité de la pensée de Jean-Paul II par rapport à l'enseignement traditionnel de l'Eglise sur la sexualité peut se résumer, dans ses très grandes lignes, par le souci de redonner au corps et au désir charnel une place éminente dans l'anthropologie catholique, et de purger l'enseignement du Magistère de toute trace de dualisme d'influence platonicienne, gnostique ou manichéenne. Dans les premières pages de La sexualité selon Jean-Paul II, Yves Semen explique comment, d'une part, Karol Wojtyla, qui a participé aux travaux préparatoires à la rédaction de la célèbre encyclique Humanae Vitae de Paul VI, avait voulu proposer un argumentaire (parvenu trop tard au Vatican) qui, tout en parvenant aux mêmes conclusions que celles qui furent finalement retenues, évitait le recours à l'enseignement classique de l'Eglise sur la "loi naturelle" et s'appuyait sur des arguments, fondés sur l'affirmation de l'égale dignité des époux:, qu'il pensait davantage recevable par des lecteurs non catholiques:

"L'homme y était posé d'emblée comme personne faite pour le don de soi, et la chasteté conjugale était présentée comme une condition de l'authenticité du don qui incluait l'ouverture à la possibilité d'une nouvelle vie. En tant que relation entre personnes, l'amour humain se doit d'être vécu comme responsable ce qui suppose que la fécondité des époux ne soit pas laissée au hasard mais qu'ils en décident de manière autonome et libre. Parce que l'homme et la femme sont des personnes égales en dignité, les moyens de réguler la fécondité doivent s'accorder aux exigences de cette dignité et à la coopération responsable entre les époux. Les moyens de contraception artificielle s'opposent à cette exigence de la dignité de la femme en tant qu'ils font peser sur elle tout le fardeau de l'évitement d'une naissance, violent son intégrité biologique par des techniques agressives et nocives pour sa santé et l'exposent à être utilisée comme objet dans un but hédoniste. En ce sens, l'utilisation de ces moyens entre en contradiction avec les exigences de la nature personnelle de la femme." (op. cit. p. 58-59).

D'autre part comment il cherche à surmonter certaines insuffisances de l'enseignement de l'Eglise sur la sexualité, notamment les restes de dualisme qui demeurent dans la théologie augustinienne, et l'approche trop naturaliste du mariage de celle de Saint Thomas d'Aquin (op. cit. p. 24 à 28).

Si cette théologie du corps se veut moderne dans son affirmation de "l'égale dignité de l'homme et de la femme", et dans la réhabilitation de l'éros (l'amour-désir) par rapport à l'agapè (l'amour-don), réhabilitation qui est également présente, d'une autre manière, dans l'encyclique Dieu est amour de Benoit XVI, elle se fonde, comme nous allons le voir plus en détail, sur l'affirmation d'"essences" distinctes de l'homme et de la femme, qui réuniraient leurs spécifications biologiques, psychologiques, spirituelles, et leur sexualité, en une même vocation, qui serait celle de "l'époux" ou de l'épouse", ce qui la place en contradiction directe avec les conclusions de nombre de travaux, dans différentes disciplines universitaires et traditions philosophiques et/ou politiques, issus des études de genre. Pour comprendre le blocage de l'Eglise et de la plupart des catholiques à l'encontre de ces dernières, il m'apparait important de ne pas se cantonner à une position défensive, qui se contente de dénoncer les erreurs contenues dans les critiques catholiques des études de genre, ni à une critique des présupposés naturalistes de la théologie catholique, certes remis à l'honneur par Benoit XVI, mais de les confronter à la pensée de Karol Wojtyla, qui donne une caution de modernité à cette dernière, et qui, si elle n'est pas forcément lue par tous les catholiques (Jean-Paul II a au moins en commun avec Judith Butler de ne pas avoir une écriture particulièrement claire), irrigue profondément leur vision du monde, via la formation des prêtres, évêques, diacres, responsables pastoraux et autres, les sessions de préparation au mariage, les propositions en direction des adolescents et des jeunes adultes visant à les accompagner dans l'apprentissage de leur sexualité (genre Teenstar...), etc.

Juste avant de rentrer dans le vif du sujet, je tiens à rappeler, en guise d'avertissement, que je ne suis pas universitaire, que je n'ai pas non plus à offrir une expertise particulièrement étendue ni sur la pensée de Jen-Paul II, ni sur les études de genre, que la lecture de ce billet ne dispense pas d'aller vérifier mes analyses à partir de sources de premières mains, et qu'il ne s'agit pas pour moi de produire une "réfutation", mais de proposer un dialogue entre études de genre et théologie du corps, à partir de trois chantiers que j'ébauche ci-dessous:

1) corps, vie sponsale, et vocation(s):


Les militants de la Manif pour tousévoquent très souvent les "conséquences "anthropologiques" des études de genre. En un sens, cela peut se comprendre, tant l'anthropologie philosophique qui fonde la pensée de Jean-Paul II est foncièrement, et jusque dans ces aspects les plus novateurs, essentialiste. Ce que nous rappelle le philosophe catholique Michel Boyancé, dans un livre dirigé contre les études de genre:



"Aristote prenait acte des finalités de la nature, sachant voir à travers elles une orientation "divine", c'est-à-dire un ordre de perfection qui ne venait pas de l'homme lui-même. Dire en effet que la distinction homme-femme est "par nature", c'est comprendre qu'il y a un sens, une orientation qui laissent intacte la liberté de l'homme, que les modernes ont bien magnifiée et mise en avant, mais qui ne peuvent être refusées par cette liberté et en son nom, au risque de se réfugier dans un monde mental fictif, coupé de la réalité. La nature agit ainsi "en vue d'une fin". Cette finalité s'inscrit dans les aptitudes de tout être, et notamment, pour l'homme et la femme, dans la capacité d'accueil de l'enfant. [...]

Dire que la personne existe en tant que "substance individuée de nature raisonnable", c'est manifester qu'elle existe pour développer ses potentialités, en d'autres termes atteindre son "bien". Celui-ci est indissociable de la capacité de relations, principalement celles qui perfectionnent la vie spirituelle, culminant dans le don de soi: "L'amour sponsal [des époux, N.d.A.] différe de tous les autres aspects et formes de l'amour[...], écrit Karol Wojtyla. Son essence est le don de soi-même, de son propre moi." Le fruit de ce don est lui-même un don: l'enfant. Loin d'être un produit satisfaisant le désir, il est donné aux parents, qui se donnent à lui. Les relations entre les personnes sont ainsi, au sens strict, non un échange de désirs ou de plaisirs, mais un échange de dons. Elles se fondent sur l'ordre biologique, mais le dépassent: la capacité de se donner et d'engendrer dans le don est spécifique à la vie humaine. "L'homme et la femme ne se trouvent pas dans une relation limitée à eux seuls. Par la force des choses leur relation englobe la nouvelle personne qui, grâce à leur union, peut être (pro)créée." (Michel Boyancé, Masculin, féminin: quel avenir? Edifa/Mame, Coll. "Matières à penser", 2007, p. 102 à 104).
Quand Karol Wojtyla parle de "nature", il s'agit de celle aristotélicienne, qui n'est pas inerte, mais orientée vers une fin. Tout être, à des degrés divers, est un composé de matière et de forme, de puissance et d'acte, qui tend vers l'individuation. Le corps n'est pas que le réceptacle de l'âme, appelé à être définitivement abandonné à la mort, mais forme avec elle une unité substantielle, qui participe du plan de Dieu et de la dignité de l'homme et de la femme (en théologie catholique, la résurrection à la fin des temps sera d'ailleurs corps et âme).

"Il est indéniable que le corps exprime, selon Jean-Paul II, le caractère sacré de la personne. Il détermine aussi sa participation au monde créé. La corporéité établit ainsi des règles inaliénables pour la compréhension de l'homme et de la femme sur le plan théologique. Elle établit aussi des rôles spécifiques pour les baptisés, rôles qui sont profondément inscrits dans l'anthropologie chrétienne. Pour le pontife, l'âme rationnelle, qui fait partie de la définition même de la personne, ne détermine pas seulement une perspective métaphysique de l'être. Elle atteint aussi très profondément le lieu des émotions et des sentiments, c'est-à-dire la réalité psychique de la personne. Le déterminisme corporel, dans la pensée jean-paulinienne, englobe de ce fait les fonctions somatiques et psychiques de l'être créé. Effectivement, dans cette perspective, la personne s'inscrit dans un corps parce qu'il forme une unité substantielle avec l'âme rationnelle. C'est dès le début, c'est-à-dire à l'origine, que l'humain-personne «est dans le monde visible en tant que corps parmi les corps, et qu'il découvre le sens de sa propre corporéité» (Jean-Paul II 1979b: 962). Le corps, selon le Saint-Père, exprime donc la personne comme sujet, comme auteur d'une activité typiquement humaine. L'appartenance à l'un des deux sexes détermine, pour la personne-corps, l'orientation de tout son être. " (Le féminisme selon Jean-Paul II: l'impasse du déterminisme corporel, Patrick Snyder, Sciences religieuses, 29:3, 2000).
L'ironie est que c'est précisément l'aspect "moderne", novateur de la théologie de Jean-Paul II, celui par lequel il tente de réhabiliter le désir sexuel dans l'enseignement de l'Eglise, qui rend ses promoteurs difficilement réceptifs aux études de genre: toute la vocation "sponsale" des sexes étant inscrite dans la chair même de l'homme et de la femme, dans la signification métaphysique de leur corps biologique, toute tentative de dissocier corps biologique, représentation sociale des sexes, identité de genre et orientation sexuelle, en ce qu'elle décompose ces aspects en autant de parties réassemblables autrement s'oppose à cette unité dynamique du corps, de l'âme, de la vie conjugale et du Salut qui est au centre de la théologie du corps. Certes, celle-ci reconnait que des conditionnements sociaux peuvent influer sur les conceptions du mariage et de la différence H/F suivant les lieux et les époques, de manière accidentelle, mais pas remettre en question ceux-ci dans leur essence et leur "évidence", car ils sont au coeur même de la vocation de l'homme et de la femme, de la manière dont notre existence est ordonnée à la Création et au Salut, telle qu'elle est conçue actuellement par l'Eglise:

Dans le chapitre consacré au sexe biologique, dans l'annexe d' Amour et responsabilité, après deux pages et demi consacrées aux aspects physiologiques de la différenciation sexuelle (sexe génétique, gonadique, hormonal, etc.), Karol Wojtyla donne l'interprétation personnaliste suivante de celle-ci (les passages en gras sont de lui):


"Ces données élémentaires sur la biologie de la sexualité (génétique, anatomie, endicronologie) ne constituent que la base de la composante somatique de la personne et n'apportent pas une compréhension profonde du concept de sexe, dont nous n'avons d'ailleurs pas analysé les anomalies, que conditionnent ces composantes biologiques.

En revanche, la constatation que le sexe est une propriété de l'individu humain ouvre des horizons bien plus larges. En effet, l'individu humain est une personne et une personne peut être sujet et objet de l'amour qui naït précisément entre personnes. Cet amour naît entre la femme et l'homme non parce qu'ils sont deux organismes, mais parce qu'ils sont deux personnes de sexe différent. La différenciation sexuelle vue sous cet angle purement biologique vise un seul but: la procréation qu'elle sert directement. Que celle-ci doive avoir sa base dans l'amour ne résulte en aucune manière d'une analyse biologique du sexe, mais du fait métaphysique (c'est-à-dire extra et supra-biologique)de la personnalité de l'homme. Le sexe, en tant que particularité de la personne, peut jouer un rôle dans la naissance et le développement de l'amour, mais il ne pourrait constituer à lui seul une base suffisante de cet amour.
Dans l'analyse psychologique de l'amour (deuxième partie du chapitre II), nous avons attiré l'attention sur les valeurs du corps et du sexe, objet adéquat de la réaction sensuelle. Nous avons constaté en même temps que ces réactions fournissaient matière à l'amour entre la femme et l'homme. L'analyse biologique du sexe et de la vie sexuelle à laquelle nous venons de procéder ne montre pas clairement ces valeurs ni la valeur de leur expérience. Les faits de nature somatique et les processus physiologiques qui appartiennent au domaine neuro-végétatif ne conditionnent que de l'extérieur cette expérience des valeurs du corps et du sexe, celle-ci ne s'identifiant pas avec les faits biologiques bien qu'elle soit conditionnée par eux. Or, si cette expérience a dans l'amour l'importance que nous soulignée dans les chapitres précédents, (surtout dans le deuxième), c'est précisément parce que le sexe est une propriété de la personne." (Amour et responsabilité, Karol Wojtyla, Stock, 1998, p. 247-248).
Il me semble que nous touchons ici à l'une des raisons majeures de l'affirmation, par divers universitaires catholiques, de la supériorité de la théologie du corps sur les études de genre: contrairement à elles, elle développerait un discours sur l'être de l'homme et de la femme, et de leur relation conjugale, qui permettrait de dépasser la simple nature biologique, le plaisir des sens et la reproduction de l'espèce, pour leur donner une signification qui transcende celle-ci et leur fait accéder à une surnature, qui s'exprime dans le don: don réciproque d'eux-mêmes par l'union complémentaire de leurs deux personnes de sexe opposé, don à Dieu par le sacrement indissoluble du mariage, et finalement don de la vie dans l'acte de procréation. Alors que les études de genre, dont ils retiennent qu'elles dissocient du corps biologique sexué l'identité de genre et l'orientation sexuelle, semble briser cette dynamique unitaire du don réciproque des corps sexués , et retirer à la sexualité toute finalité supérieure (et même certaines finalités naturelles comme la reproduction) pour ne laisser que le plaisir des sens. Ce qu'illustre, par exemple, d'une façon il est vrai particulièrement polémique, la manière dont Michel Boyancé, dans le livre cité plus haut, déduit de l'analyse par l'anthropologue Cai Hua (exposée dans son livre Une société sans père ni mari: les Na de Chine) de l'ethnie himalayenne des Na, qui présente un modèle de cellule familiale qui n'est pas organisé autour du modèle père-mère, "l'hédonisme fondamental de la vie sexuelle humaine", admettant que le modèle père-mère des sociétés occidentales est une construction culturelle, mais qui élèverait la nature de l'homme et de la femme (par là, il pose comme un constat évident, d'une manière que je trouve extrêmement choquante, ce qu'il devrait à mon sens démontrer de manière développée: que sortir du modèle occidental père-mère ne peut mener qu'à la décadence morale et à des unions fondées sur le seul plaisir utilitariste, sans parler du côté "bon sauvage à l'état de nature" de son analyse qui semble dépassé largement par plusieurs décennies d'études anthropologiques et ethnologiques):

"Les femmes sont libres de l'utilisation de leur corps, sans inhibitions ni contraintes morales. La vie sociale "na" réalise la libre activités des individus, femmes et hommes, qui fondamentalement obéissent aux lois du plaisir sexuel." (op. cit. p.18).
Dans l'Encyclique Evangelium Vitae, Jean-Paul II souligne de manière très ferme l'existence d'un lien, pour lui indissoluble, entre finalité du corps, rôle de la sexualité, et procréation, qui a pour conséquence essentielle de faire du modèle hétéroparental père-mère-enfant la seule modalité possible de la vie conjugale comme don, par opposition à la recherche hédoniste du plaisir: 

"Toujours dans le même contexte culturel, le corps n'est plus perçu comme une réalité spécifiquement personnelle, signe et lieu de la relation avec les autres, avec Dieu et avec le monde. Il est réduit à sa pure matérialité, il n'est rien d'autre qu'un ensemble d'organes, de fonctions et d'énergies à employer suivant les seuls critères du plaisir et de l'efficacité. En conséquence, la sexualité, elle aussi, est dépersonnalisée et exploitée: au lieu d'être signe, lieu et langage de l'amour, c'est-à-dire du don de soi et de l'accueil de l'autre dans toute la richesse de la personne, elle devient toujours davantage occasion et instrument d'affirmation du moi et de satisfaction égoïste des désirs et des instincts. C'est ainsi qu'est déformé et altéré le contenu originaire de la sexualité humaine; les deux significations, union et procréation, inhérentes à la nature même de l'acte conjugal sont artificiellement disjointes; de cette manière, on fausse l'union et l'on soumet la fécondité à l'arbitraire de l'homme et de la femme. La procréation devient alors l'« ennemi » à éviter dans l'exercice de la sexualité: on ne l'accepte que dans la mesure où elle correspond au désir de la personne ou même à sa volonté d'avoir un enfant « à tout prix » et non pas, au contraire, parce qu'elle traduit l'accueil sans réserve de l'autre et donc l'ouverture à la richesse de vie dont l'enfant est porteur." (Evangelium Vitae, 24).
L'une des conséquence implicite de cette affirmation réside dans l'impossibilité, au regard de tels présupposés, pour l'union homosexuelle de constituer une forme de don, d'union sponsale véritable. Préserver la cohérence de cette thèse nécessite de dévaloriser a priori l'amour qui unit les couples homosexuels en le présentant comme une forme de déviation, fondée sur la recherche du plaisir égoïste (ce qui explique le très grand succès, en milieu catholique, de l'oeuvre de Philippe Ariño, au passage manifestement très marqué par la théologie du corps de Jean-Paul II, bien que je ne vois pas personnellement quelle légitimité cet auteur a pour faire de l'analyse de son désir propre la vérité de tout désir homosexuel, au mépris des témoignages d'homosexuels qui affirment aimer leur partenaire d'un amour vrai -jamais il ne me viendrait à l'idée de faire de mon ressenti d'hétérosexuel le ressenti de tous les hétérosexuels-, et que ses travaux me paraissent trop empiriques et péremptoires pour être convaincants). 

La supériorité des analyses et des présupposés théoriques et méthodologiques de la théologie du corps sur ceux des études de genre serait donc la suivante, selon ses partisans: elle donnerait la dimension d'une vocation à la différenciation H/F, dans la vie "sponsale".  Il s'agit au passage d'un des points forts de la pensée de Jean-Paul II: avoir voulu souligner combien le mariage est une vocation dont la dignité est égale à celle de la vie religieuse et sacerdotale, qu'il est aussi un sacrement, et non un état de vie inférieur pour ceux dont la chair est faible.

Le mariage, les vocations sacerdotale, religieuse, de laïc consacré. Voilà qui offre un éventail de possibilité assez large, qui semble assurer le bonheur et l'épanouissement psychologique et spirituel de beaucoup, et qui, aux yeux de la plupart des catholiques, est très complet. Pourtant, celui-ci exclut de nombreux états de vie: couples de même sexe, célibataires qui n'ont pas ressenti (ou pas réussi à ressentir) d'appel à une vie consacrée, personnes dont le couple s'est brisé, et qui sont désormais divorcées, voire divorcées et remariées. La théologie du corps dit l'être de l'Homme, mais pas l'être de tous les hommes. En revalorisant la vie conjugale, elle manifeste a contrario l'étendue des états de vie auxquels l'Eglise, implicitement ou explicitement, consciemment ou inconsciemment, suivant les cas, refuse la même légitimité, la même dignité.

Et certes, elle assume et revendique: les homosexuels, en tant que personnes, ont la même dignité que les hétérosexuels, mais leur sexualité est désordonnée, au sens où son seul horizon est le plaisir sexuel et où elle ne s'accomplit pas comme don, dans l'altérité des sexes et la procréation. Les célibataires, s'ils n'accomplissent pas cette vocation sponsale du don ni dans les voeux de la vie presbytérale, ni dans le mariage, sont encouragés à trouver d'autres manières de se donner, dans la vie de l'Eglise et dans la défense du bien commun. Les divorcés remariés se sont exclus eux-mêmes des sacrements, mais sont invités à vivre autrement l'Eucharistie, dans l'abstinence et la prière. Et des pastorales sont de temps à autres proposées, avec plus ou moins de vigueur, d'audace et de fréquence suivant les différentes situations, pour remédier à ces situations de vocations en négatif.

Il reste que prétendre dire l'être, l'orientation, la finalité, la vocation de la vie humaine tout en excluant délibérément certains états de cette vie, qui souvent sont subis plutôt que choisis (on ne choisit pas d'être célibataire, on ne choisit pas d'être homosexuel, et beaucoup de divorcé(e)-remarié(e)s sont des victimes qui ont juste cherché à se reconstruire).est d'une violence extraordinaire à l'encontre des intéressés, qui n'ont d'autre choix de "se donner" que de manière négative, par une abstinence qui ressemble extraordinairement à une pénitence, pour des fautes qui sont bien difficiles à définir.

On peut certes dire qu'il y a des différences dans la nature: que certains sont riches et d'autres pauvres. Que certains vivent vieux, et d'autres meurent jeunes. Que certains sont malades, ou handicapés, et d'autres bien portants. Et que c'est comme ça. Ou encore, comme certain(e)s catholiques aiment bien faire, écraser l'ensemble du débat en rappelant que Dieu ne veut pour l'homme que le meilleur, et que l'abstinence, pour toutes ces personnes en marge des vocations reconnues, est un moyen de devenir meilleures, et de connaitre une joie plus grande, dans une vie donnée pour Dieu. Et comme Sainte Blandine exultait dans l'arène malgré les tortues et l'agonie, cessons de participer à l'élaboration d'une société meilleure de réfléchir à une meilleure répartition des richesses, à plus de sécurité, un environnement plus durable, des minorités (par exemple chrétiennes au moyen-orient) mieux protégées. Puisque Dieu veut le meilleur de nous-mêmes, offrons lui le don ultime de nous-mêmes, revenons aux sources de l'Eglise. Le martyre pour tous!

Troll mis à part, ces pirouettes rhétoriques, tellement à la mode en ce moment, expliquent mal pourquoi certains ont une vocation taillée sur mesure, qui s'accommode magnifiquement des besoins de la vie sociale et de la chair, et d'autres une vocation en négatif, qui ne naît pas de leur état, mais de la renonciation à celui-ci, et cela sans nécessairement avoir volontairement fauté. Certes, Dieu aime qu'il y ait des différences. Mais on pourrait penser que dans le domaine des vocations, du don, qui est le volet proprement spirituel et surnaturel de la vie humaine, chaque personne serait appelée par Dieu à cheminer vers lui selon sa propre histoire (qui est aussi, certes, celle de son péché, mais y-a-t-il véritablement péché dans ces cas à la marge?), et non suivant la possibilité de son inclusion dans des cases, des états de vie, qui ressemblent tout de même singulièrement aux modes de vie traditionnellement majoritaires de nos sociétés occidentales, et donc à des injonctions de nature sociale et culturelle, beaucoup plus qu'à la vérité révélée de notre humanité.

Ainsi, pour ce qui concerne l'hétérosexualité comme fondement "naturel" de la vie du couple, qui incarnerait par le don réciproque des deux sexes la vocation sponsale à la racine de la différenciation sexuelle:


"Ainsi, toute conception qui n'est pas résolument et radicalement antinaturaliste est naturaliste et différentialiste, différentialiste parce que naturaliste et naturaliste et naturaliste parce que différentialiste. Le paradigme du genre fondé sur le sexe s'inscrit donc dans une philosophie profondément entachée d'erreur. 

Des résistances à l'analyse
Le principale de ces erreurs, c'est qu'elle considère implicitement (tome 1, "Avant-propos") que les groupes existent sui generis et ne viennent en rapport qu'une fois constitués. mais constituée par quoi? Quand, pour la plupart des gens (y compris les professeurs au Collège de France), on n'étudie que les rapports entre les groupes, on postule sans le dire que la question de la constitution des groupes a été réglée. Ne pas s'interroger sur l'origine de ces groupes, c'est admettre que cette origine est "naturelle". C'est cette démarche que j'ai mise en cause, avec pour résultat que j'ai inversé le processus: les relations ne viennent pas après l'existence des groupes, puisque ceux-ci ne sauraient exister avant l'existence d'une organisation sociale. Il en découle que seule l'organisation sociale, qui est faite de relation, peut être à l'origine des groupes. 
Bien que cette conclusion paraisse audacieuse, elle est dans le droit fil tant de l'étude des hiérarchies que des théories qui me semblent les plus scientifiques sur la perception et la cognition. Elle est le point nodal de ma démarche, que je n'ai cessé de répéter sous des formes diverses dans tout mon travail: c'est dans le même moment et par le même mouvement que les groupes sont créés et sont créés dominants ou dominés. La question de "la différence" ou les différences ne se pose alors plus: ou plutôt elle se pose de façon entièrement différente. La ou les différences ne peuvent avoir un quelconque rôle causal dans la hiérarchie puisqu'elles ne lui préexistent pas. 
Et pourtant, alors même que cette pensée de la différence naturelle, outre qu'elle est un obstacle au développement de la réflexion sur les dominations sociales, est un tissu d'absurdités, il est impossible à la plupart des gens de l'abandonner; bien au contraire, elle ne cesse de se répéter, sous des formes à la fois semblables et nouvelles. Semblables, parce que c'est une pensée paresseuse (donc conservatrice) qui rechigne à renoncer aux facilités intellectuelles; nouvelles parce qu'elle se branche sur les valeurs actuelles, se coule dans des moules modernes: s'habille en "ordre symbolique" ou en amour de "l'altérité". Elle montre alors qu'elle est conservatrice de manière plus active. La différence sexuelle est en effet présentée - au mépris de l'expérience de chacun-e - comme la seule "altérité": "[elle] est le butoir ultime de la pensée, sur laquelle est fondée une opposition conceptuelle essentielle: celle qui oppose l'identique au différent" (Héritier 1996). Quand la personne de sexe opposée est présentée comme le seul "autre", les personnes de "même sexe" étant toutes "identiques", le lien hétérosexuel devient un "must" éthique sauf à courir le risque d'être d'être accusé-e d'autisme. Toutes les autres relations humaines, et surtout les relations dites "homosexuelles" sont frappées d'infamie - dans le jargon actuel psychanalysant, taxées d'infantilisme et de "régression"." (Christine Delphy, L'ennemi principal II: Penser le genre, Syllepses, 2009, p. 29 à 31).
Et pourtant des couples homosexuels s'aiment en vérité, et se donnent l'un à l'autre de tout leur être, pas seulement dans la recherche du plaisir sexuel, mais dans un amour qui élève tout leur être. Et des couples hétérosexuels sont gravement dysfonctionnels, du point de vue de la vie de couple comme de celui de la parenté (l'inverse existe aussi évidemment).  Ne peut-on alors se demander si ce désordre supposé "intrinsèque" aux unions homosexuelle est véritablement fonction d'un ordre divin, et non d'un ordre social et culturel confondu avec ce dernier, dans une anthropologie trop formaliste?

On pourrait en ce sens formuler une critique de certains des aspects de la métaphysique de la sexualité qui fonde le discours de l'Eglise comparable à celui qui est dirigé contre sa métaphysique de l'être depuis le 14ème siècle. De même que cette dernière aurait pris les structures du langage pour des essences réelles, la théologie du corps confondrait des injonctions normatives de type socio-culturel, qui modèleraient notre perception des corps suivant les discours en usage sur ce qu'est une vie "respectable", avec leur nature et leur destination réelles. Cette critique "nominaliste" du discours sur la sexualité par l'Eglise n'ayant pas pour but de mettre à mal cette dernière, mais de restaurer la pleine responsabilité de chacun, par rapport à son histoire personnelle et sa responsabilité propre, devant Dieu, libérant le discours théologique sur la vocation de l'homme des brouillages normatifs de type culturel qui semblent  le parasiter, et, plutôt que de promouvoir, au détriment d'autres, certains états comme des voies privilégiées vers la sainteté, rendre pensable, suivant la belle expression de mon confrère blogueur Baroque & fatigué, la "sainteté pour tous".

Je vois déjà certains, à la lecture du précédent paragraphe, se braquer sur le mot "nominalisme" et réaffirmer avec véhémence leur attachement au réalisme thomiste, contre le "relativisme" contemporain. Outre, malgré mon réel respect pour l'oeuvre de l'Aquinate, que se braquer d'emblée contre une bonne partie de l'Histoire de la philosophie d'après le 13 ème siècle ne me semble pas particulièrement un signe de bonne santé d'une certaine pensée catholique de ces dernières décennies, je remarque que des auteurs aussi souvent critiqués qu'Ockham, Descartes ou Kant  ne sont pas vraiment réfutés, dans leurs objections principales contre la vision du monde aristotélicienne, par les métaphysiciens catholiques, mais que ceux-ci leur reprochent surtout d'être incapable de dire le sens de l'être de l'homme.

Or, une métaphysique qui n'arrive pas à dire cet être pour tous les hommes et toutes les femmes, mais qui assigne à certains, suivant certaines de leurs spécificité qui ne sont pas dues à leur volonté propre, un déficit d'être, une vocation en négatif qui ne s'accomplit que par le refus, dans l'abstinence imposée, d'une partie de leur histoire et de ce qu'ils sont, n'est-elle pas, au moins en partie, un échec?

25 commentaires:

  1. Manu,

    Tu confonds à un moment dans ton billet désordre et péché.

    Pour être plus précis, là où l'Eglise dit que l'homosexualité est un désordre (i.e. ne correspond pas à la finalité de la personne), tu supposes un péché, c'est à dire un acte qualifiable moralement, donc un acte de la volonté .

    Or, il y a moult désordres qui ne sont pas de l'ordre du péché.
    - Dans la physiologie, le handicap ou la maladie
    - Dans la psychologie, la blessure
    - Dans la raison, la méconnaissance de la réalité des choses
    - etc.

    La seule chose que l'on dit, en théologie catholique (et plus particulièrement en théologie thomiste marquée par la philo d'Aristote), quand on parle de désordre, c'est qu'il y a quelque chose qui empêche un être, une chose ou un acte d'atteindre sa perfection.

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    1. Tu as raison de souligner ce manuqe de rigueur terminologique de ma part.

      Effactivement, la dans le cas de l'homosexualité, la tendance homosexuelle est "objectivement désordonnée", mais ne constitue pas un péché. Ainsi, Philippe Ariño (exemple au hasard ;-) ) n'est pas en état de péché du simple fait qu'il est homosexuel.

      Par contre, l'acte homosexuel en lui-même est "intrinsèquement désordonné", "intrinsèquementt mauvais", "contraires à la loi naturelle", et un péché grave.

      Outre que mon billet (peut-être trop implicitement), prend quelques distances avec le cadre aristotelo-thomiste de la théologie morale de l'Eglise, il me semble donc que le problème que je soulève reste entier:

      "es pirouettes rhétoriques, tellement à la mode en ce moment, expliquent mal pourquoi certains ont une vocation taillée sur mesure, qui s'accommode magnifiquement des besoins de la vie sociale et de la chair, et d'autres une vocation en négatif, qui ne naît pas de leur état, mais de la renonciation à celui-ci, et cela sans nécessairement avoir volontairement fauté. "

      Le distinction personne/acte que tu m'opposes reste dans la pirouette, dans la mesure où dans cette conception, l'amour homosexuel, entendu comme union, ne peut s'accomplir sans dégénérer en péché, et que contrairement à l'amour hétérosexuel où l'agapè accomplit l'éros, ce dernier doit se nier pour devenir agapè. Ce qui revient à nier que l'amour homosexuel puisse s'accomplir comme don.

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    2. La distinction acte / personne n'est pas une pirouette.

      Ca serait évident pour toi si tu la sortais du seul cadre où tu la perçois, à savoir l'homosexualité. C'est beaucoup plus large que cela.

      Elle provient juste du simple réalisme qui consiste à dire que nos actes ne sont pas simplement le fait d'une volonté
      1. complètement autonome,
      2. toujours parfaitement éclairée par une raison omnisciente,
      3. non influencée par notre structure psychologique (elle-même au moins partiellement issue de nos expériences) ou par nos passions, ou...

      Bref, tout ce qui est désordonné n'est pas immédiatement coupable. C'est ce qui fait que le Christ n'est pas venu pour juger mais pour sauver.

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    3. Pour poursuivre la réflexion, suivant ce point de vue, tu comprendras que quelqu'un ayant cette tendance inscrite dans sa psychologie est bien moins "coupable" si elle vit cet acte que moi, qui n'ai aucune tendance en ce sens.

      Mais abandonnons juste l'idée de "culpabilité" une seconde. Nous ne sommes pas d'abord dans le jugement, dans la condamnation.

      Nous sommes dans la recherche de ce qui amène la personne à sa perfection. Or, l'Eglise reconnaît dans la conjugalité un tel élément. Elle affirme en même temps que, sans nier la générosité des personnes homosexuelles, leur volonté de se donner, etc. l'acte homosexuel n'a pas la dimension d'un acte conjugal.




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    4. "Nous sommes dans la recherche de ce qui amène la personne à sa perfection. Or, l'Eglise reconnaît dans la conjugalité un tel élément. Elle affirme en même temps que, sans nier la générosité des personnes homosexuelles, leur volonté de se donner, etc. l'acte homosexuel n'a pas la dimension d'un acte conjugal. "

      Là est tout le problème. Elle maintient une posiition qui a des implications grave sur des personnes, à partir de présupposés sur la finalité de la vie conjugale trop univoques, abstraits, et fondés sur des présupposés philosophiques respectables en eux-mêmes, mais contestables et contestés.

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  2. Rapide commentaire plus sur le fond (précisons-le : en n'ayant pas encore lu ton second billet)

    Je trouve intéressante l'idée comme quoi la métaphysique chrétienne ne serait pas assez "inclusive" au sens où elle manquerait de décrire ce que vivent certaines catégories d'humains.

    Il y aurait alors comme un "vide anthropologique" (au sens de "vide juridique") sur un cas, et ce vide supposé prouverait que l'ensemble de l'anthropologie proposée n'est pas adéquate.

    Sauf qu'il n'y a aucun vide. Il y a juste une parole qui vous est un peu dure à entendre : à savoir que l'homosexualité ne permet pas d'atteindre la perfection de l'amour humain.

    Pour l'entendre très concrètement (et de l'intérieur), je vous invite à lire le billet "Le désir homosexuel ne rencontre pas l'autre en vérité" http://www.theologieducorps.fr/actualites/2012/11/desir-homo-ne-rencontre-pas-lautre-en-verite

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    1. Merci tout d'abord sur la précision désordre / péché. Dans ma propre réponse, j'ai fait la même confusion.
      en revanche, l'idée que l'homosexualité ne permet pas d'atteindre la perfection de l'amour humain me semble erronnée et infondée ; j'avais lu le témoignage d'Audrey, qui a beaucoup circulé dans les milieux cathos ces derniers mois, sans être convaincue. C'est un témoignage, intéressant en soi, ce n'est pas une vérité absolue et universelle (c'est le même problème avec Arino, d'ailleurs). Et l'idée que deux femmes, ou deux hommes, n'ont pas de différence, me fait depuis le début des discussions sur le mariage homo (et, depuis, sur le genre), dresser les cheveux sur la tête. l'altérité est intrinsèque à la relation. l'autre est autre, parce qu'il n'est pas moi, et ce qu'il soit homme ou femme. dans un discours chrétien, cela me semble d'ailleurs fondamental : Dieu rencontre chacun de nous dans son unicité.

      sur ce, je vais moi aussi m'atteler à la lecture de la suite du billet de Manu.

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    2. Véro,

      J'ajoute à cette distinction "péché / désordre" une autre précision.

      L'Eglise emploie parfois également le mot "grave". Ca ne signifie pas "particulièrement coupable" mais "qui nécessite une attention réelle". Un désordre peut-être grave :
      - de par ses conséquences (alors même qu'il n'y a pas nécessairement de culpabilité identifiée). Par exemple, l'alcoolisme est un désordre grave (car il détruit à terme la personne) sans nécessairement être un péché très coupable (car la psychologie de la personne, ses blessures, peuvent affecter de façon importante voire prédominante la volonté de la personne).
      - de par son objet (par ex. un désordre dans le domaine de la sexualité est plus "grave" qu'un désordre alimentaire, car il touche à une dimension de la personne qui touche plus particulièrement à sa capacité à entrer en relation et, in fine, ce qui fait que nous sommes "images de Dieu")
      - etc.

      Il est essentiel de ne pas confondre ces deux notions de "grave" et de "coupable". Nous pouvons être plus coupables dans un domaine moins "grave" mais où, pour autant, notre volonté était plus à même de poser un acte complètement libre.
      - Le péché le plus "coupable" est celui de dire "merde" à Dieu le jour où nous le verrons face à face. Et ça n'a rien d'un péché sexuel ;)

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    3. "Sauf qu'il n'y a aucun vide. Il y a juste une parole qui vous est un peu dure à entendre : à savoir que l'homosexualité ne permet pas d'atteindre la perfection de l'amour humain. "

      C'est un peu facile (même si, te connaissant un tout petit peu et ayant échangé avec toi IRL, je sais que tu es tout ce qu'il y a de plus sincère). A la limite, il y a peut-être une question de méthodologie. Peut-être (pour schématiser grandement) te situes-tu dans une perspective descendante: le système interrogeant les cas particuliers) alors que personnellement, je me situerai dans une perspective ascendante (les cas particuliers interrogeant le système) (ce qui, ironiquement, poserait en un sens très précis la question de savoir qui est le plus aristotélicien de nous deux).

      Je pense que le problème, que j'essayais de pointer dans mon billet, est celui de la tension entre la cohérence interne de la métaphysique catholique de la sexualité, qui ne permet pas de penser l'accomplissement "sponsal" de la sexualité en dehors de la procréation, et le constat (pour moi en tout cas) d'union homosexuelles qui élèvent chacun des membres de celle-ci, bien au dela de la recherche du plaisir des sens. Il me semble que dans de tels cas, l'interrogation prioritaire doit partir de la situation vécue concrète (si j'étais plus fort n théologien je risquerais une comparaison évangélique). En effet, il y a deux alternatives à cette question: soit déprécier les témoignages d'unions homosexuelles comme don, en estimant, comme tu le fais, que "l'union homosexuelle ne permet pas d'atteindre la perfection de l'amour humain". Soit, et c'est mon choix, induire des témoignages d'unions homosexuelles vécues comme un amour vrai et réciproque, ou même de leur promesse pour ceux qui ne l'ont pas constaté, l'idée (voire l'espérance) qu'il existe d'autres formes d'amours humains parfaits que ceux qui s'accomplissent dans la procréation. Méthode déductive vs inductive peut-être. Toujours est-il que pour moi, d'une manière que j'imagine, peut-être à tort, analogue au samaritain devenu prochain, la possibilité du péché ne prééexiste pas à la personne, et , dans une pure veine "baroquienne" (du blog Baroque et fatigué pour les lecteurs non initiés de cet échange) la possibilité que des unions homosexuelles témoignent d'une nouvelle forme de sainteté devrait primer pour moi sur la présomption d'amour "imparfait" qui pèse, en théologie catholique, sur l'acte homosexuel. Et je pense sincèrement que cette évolution à mon avis très moderne et liée à la déchristianisation, de la théologie catholique, qui la pousse à mettre l'accent sur la "cohérence" de son système de pensée et à en déduire la bonne -ou la moins bonne- marche du monde, tend à devenir un problème beaucoup plus pressant, pour l'avenir de l'Eglise, que l'homosexualité en elle-même.

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    4. "la possibilité du péché ne préexiste pas à la personne", ni même à l'acte homosexuel en lui-même.

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    5. On se rejoint au moins sur un truc : l'avenir de l'Eglise ne dépend pas de l'homosexualité :)

      Plus sérieusement :

      - Le témoignage d'Audrey cité plus haut est tout ce qu'il y a plus inductif... si on veut bien se donner la peine de le lire.

      - A mon avis, il y a deux écarts de fond entre les deux positions philosophiques présentées

      1. notre culture voit dans un acte uniquement sa motivation et non plus sa finalité.
      En bref : on réclame de se marier "parce que" l'on s'aime et non "pour"...
      Je conçois que notre culture refuse l'idée même de finalité (qui nécessite, in fine, une conviction religieuse). J'ai cependant du mal à concevoir qu'elle soit aussi opaque à nombre de catholiques (au nombre desquels Baroque et toi..).

      2. notre culture souffre de l'absence de deux notions : le péché et la rédemption.

      Dès lors, cette culture place dans la spontanéité la valeur de tout acte. "Si je l'ai désiré, c'est que c'était bon." Et si j'ai de la culpabilité, faisons un tour chez le psy qui va me passer de la pommade-à-endormir-la-conscience... Et si la culpabilité reste, n'ayant aucune échappatoire (puisque pas de rédemption), il ne me reste plus qu'à exiger de la société qu'elle me justifie.

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    6. Je suis totalement d'accord avec la réponse de Manu. Je l'ai dit dans un commentaire d'un précédent billet : je trouve que l'Eglise, sur l'homosexualité comme sur le divorce et le remariage, parle encore trop du haut de sa chaire. Elle accueille les personnes, oui ; il existe une pastorale pour ces personnes, oui. Mais l'objectif avoué est de faire admettre à ces personnes qu'elles sont dans une situation qui n'est pas orientée vers leur Bien réel et de les pousser à mettre fin à ce "désordre". Or, les écouter d'abord est primordial - y compris quand ce qu'ils ont à dire n'est pas qu'ils sont en souffrance...

      Incarnare, ok sur grave / coupable ; reste que quand on demande à tel type de pécheur, et pas à tel autre, de rester écarté de la communion, on culpabilise bien l'un plus que l'autre (et le discours sur la participation "autrement" au mystère eucharistique m'a toujours paru d'une hypocrisie terrible).
      on peut être coupable d'un péché grave qui soit aussi un désordre grave - et la hiérarchie du péché telle qu'elle apparaît dans certains discours ecclésiastiques me paraît fort discutable.

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    7. " Le témoignage d'Audrey cité plus haut est tout ce qu'il y a plus inductif... si on veut bien se donner la peine de le lire. "

      Et si on le considère en lui-même et non ramenée aux témoignages d'homosexuels dans leur globalité, toutes tendances confondues... ;-)

      "notre culture"

      Notre culure, notre culture...

      S'agit-il d'instruire le procès de notre "culture", au regard de notre éducation catholique? Ou ne s'agit-il pas plutôt de placer en regard les innovations sociales, scientifiques (sciences "dures" comme SHS), politiques, de cette dernière et les acquis que l'Eglise a tiré de sa propre histoire, pour les faire dialoguer (car comment penser que l'Eglise a une histoire, une tradition, sans penser en même temps son dialogue avec les cultures successives qu'elle a traversé, ce qu'elle leur a apporté, mais également ce qu'elle en a retiré?).

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    8. En guise de réponse sur ce point, je vais te conseiller la même lecture que j'ai proposée à Baroque car je crois qu'elle éclaire quelques difficultés de notre dialogue.

      Je pense que ça t'intéressera, ça parle de la manière dont une science se construit dans une tradition.. Le titre : "L'implication personnelle du sujet dans la connaissance" http://www.academia.edu/attachments/30533515/download_file

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  3. Merci pour ce billet comme d'habitude clair et argumenté. je rebondis sur une phrase, qui n'est qu'une parenthèse dans votre propos mais me semble fondamentale pour une réflexion dans l'Eglise sur ces questions liées au mariage et à la sexualité :

    "mais y-a-t-il véritablement péché dans ces cas à la marge?"

    un ami homo me disait un jour qu'il en avait un peu marre du discours de l'Eglise sur les homos, et que de toutes façons Dieu invitait au pardon des péchés... Je lui ai répondu que pour moi, la question n'était pas là puisqu'il n'était pas plus pécheur que moi (ni moins :D ). Je suis frappée par le nombre de cathos homos qui ont intégré cette idée qu'ils sont dans le péché, et qui souffrent non pas de cet état de péché, mais que l'Eglise ne veuille pas le leur pardonner.
    Idem avec les couples utilisant la contraception, ou les divorcés-remariés. C'est l'idée même qu'ils sont en état de péché, ou du moins en état de péché plus grave que tous ceux que commettent tous les autres cathos en situation matrimoniale considérée, elle, comme légitime par l'Eglise, qu'il me semble devoir remettre en cause.
    Si on considère ces trois catégories, il est d'ailleurs clair qu'aujourd'hui, il ne vient à l'idée d'aucun prêtre de demander à un couple s'il utilise un moyen de contraception, et si oui, de rester écarté de la communion. La question ne rentre plus en ligne de compte (alors qu'en termes réglementaires, si j'ose dire, elle n'a pas évolué).

    La morale sexuelle et matrimoniale de l'Eglise reste très marquée par l'idée de péché - et si la théologie du corps de Jean-Paul II met volontiers en avant la dignité du couple et de la sexualité, ce n'est que dans le cadre matrimonial défini par l'Eglise depuis Latran IV (pour simplifier). Et on trouvait déjà chez Gerson ou Jean-François de Sales des idées pas si éloignées de cela de celles de JPII... (la sanctification dans le couple passe par l'union charnelle).
    J'ai toujours considéré que la sacramentalisation du mariage était une idée formidable de l'Eglise - et une vraie révolution morale. Mais je pense aussi qu'elle ne peut pas contenir en elle-même toute la morale sexuelle ; l'idée que l'acte sexuel hors mariage est par nature peccamineux doit être discutée.

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    1. Vero,

      En plus des développements sur "désordre / péché" et "grave / coupable" en réponse à votre commentaire précédent, votre commentaire m'inspire la réflexion suivante :

      En plus d'un bagage théologique quasi-vide, la génération qui nous précède nous a livré une formation humaine totalement nulle.

      - Nous ne faisons plus naturellement, par exemple, la distinction entre volonté / raison / pyschè / sensation / physiologie qui est pourtant essentielle pour aborder les questions morales.
      Qui sait encore que le péché se joue uniquement dans la volonté ? Que la psychè, la raison, etc. peuvent présenter à notre volonté des idées fausses à laquelle celle-ci se soumet sans qu'il y ait nécessairement de péché ? Que toute faute n'est donc pas un péché ?

      - A la place, la plupart d'entre nous a été élevé avec un gloubi-boulga de culpabilité et d'auto-justification. Toutes choses qui n'ont rien à voir avec le catholicisme.

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    2. je ne sais pas si c'est "la plupart d'entre nous" (il faut dire que j'ignore votre âge !). il me semble que c'est plutôt la génération précédant la mienne (je suis née après Vatican II ;-) ) qui a le plus subi le discours culpabilisant - pour ma part, je n'ai jamais été marquée par cette dimension, même si des amis de mon âge l'ont subie également.
      le fait que le péché n'existe que s'il y a volonté de péché (merci Thomas) est effectivement peu connu ; ceci dit, c'est en partie la faute de l'Eglise, qui n'a pas su enseigner sa propre morale (et ce n'est pas nouveau ; contrairement à ce que disent certains, elle ne le faisait pas mieux avant Vatican II) et est passée d'un apprentissage aride de règles morales plus ou moins, et plutôt moins que plus, explicitées, à un discours, ou plutôt deux discours, trop distants l'un de l'autre (le discours de la théologie morale, l'enseignement aux fidèles) : les homélies ont rarement une dimension morale profonde, et le catéchisme ne dépasse guère le "Jésus est ton copain" (je caricature un peu, certes).

      je relis en diagonale (et je vais devoir relire autrement qu'en diagonale, tellement c'est dense) Veritatis Splendor : la distinction désordre-péché y est lisible, mais les deux sont très liés. l'acte désordonné est de toutes façons moralement mauvais.
      je cite un passage : "Si les actes sont intrinsèquement mauvais, une intention bonne ou des circonstances particulières peuvent en atténuer la malice, mais ne peuvent pas la supprimer. Ce sont des actes « irrémédiablement » mauvais ; par eux-mêmes et en eux-mêmes, ils ne peuvent être ordonnés à Dieu et au bien de la personne : « Quant aux actes qui sont par eux-mêmes des péchés (cum iam opera ipsa peccata sunt) — écrit saint Augustin —, comme le vol, la fornication, les blasphèmes, ou d'autres actes semblables, qui oserait affirmer que, accomplis pour de bonnes raisons (causis bonis), ils ne seraient pas des péchés ou, conclusion encore plus absurde, qu'ils seraient des péchés justifiés ? » 134.
      et peu après : " En outre, l'intention est bonne quand elle s'oriente vers le vrai bien de la personne en vue de sa fin ultime. Mais les actes dont l'objet « ne peut être ordonné » à Dieu et est « indigne de la personne humaine » s'opposent toujours et dans tous les cas à ce bien. Dans ce sens, le respect des normes qui interdisent ces actes et qui obligent semper et pro semper, c'est-à-dire sans aucune exception, non seulement ne limite pas la bonne intention, mais constitue vraiment son expression fondamentale."

      quand l'Eglise dit que l'acte homosexuel est désordonné par nature, elle le place bien dans le champ de ce qui ne peut pas être moralement bon, et, si on suit la référence à st Augustin, un péché (je suis tout à fait prête à entendre que je n'ai pas compris, je le précise).
      l'appel aux évêques pour la transmission de l'enseignement moral de l'Eglise, que contient l'encyclique, ne me semble pas avoir été suivi de beaucoup d'effets...

      une vraie difficulté est qu'un enseignement moral digne de ce nom ne peut pas être une suite de règles à suivre. il suppose une formation à la réflexion morale - et une profonde humilité de l'enseignant, qui ne peut prétendre détenir la Vérité qui ne réside qu'en Christ. être conscient qu'on ne fait que tenter de l'approcher, au mieux de ses capacités et de sa conscience, est fondamental.

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    3. Véro : j'ai la chance d'être né après l'élection de JPII (voilà qui vous donne une idée de mon âge :p)

      Il y a en effet de nombreuses dimensions à la bonté ou la malice d'un acte humain (cf. ST IIa-IIae Q18 à Q21) : conformité de son objet à la raison, sa finalité, ses circonstances, etc. et le champ moral ne peut, comme vous l'indiquez, se résumer à une liste de règles.

      Mais in fine, le mal n'est jamais que l'absence de bien, ce qui nous empêche d'atteindre la perfection de notre être. Jean-Paul II dit qu'il y a connaturalité entre l'homme et le bien véritable.

      Il ne nous faut pas perdre cela de vue quand nous parlons morale : il ne s'agit pas d'attribuer des torts et de balancer des fardeaux, mais d'indiquer la possibilité de la rédemption.

      Proclamer cette rédemption, c'est effectivement prendre le risque de braquer (et de se prendre des baffes par) ceux qui, souvent parce qu'ils n'ont pas ou plus d'espérance en cette rédemption, choisissent de se construire sur leur blessure.

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    4. là dessus, je suis assez d'accord avec vous.

      vous êtes un vrai jeunot :D

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  4. @incarnare:

    "La distinction acte / personne n'est pas une pirouette."

    Elle l'est dans l'application que l'Eglise en propose pour l'homosexualité, au sens il lui permet de se dédouaner de situations intenables telle que la condamnation des personnes homosexuelles en elles-mêmes, mais où elle ne leur donne aucune aliternative entre l'abstience et le péché (au sens où vivre une vie accomplie conformément à leur inclination est un péché, au sens où l'acte homosexuel est intrinsèquement mauvais). En ce sens, l'Eglise, comme je le développe mon billet, délivre un discours sur l'être de l'homme qui relègue une partie de l'humanité (par exemple les homosexuels qui ne peuvent accomplir leur être dans sa dimension charnelle de la sexualité, sans tomber dans le péché, et qui n'ont donc comme alternative tenable qu'une vocation en négatif, subie et non véritablement choisie) dans le non être, au sens où accomplir son être ressenti (ses "tendances") nierait son être véritable (comme vocation sponsale). En ce sens, sur des bases qui ne découlent pas de de conséquences graves qui seraient indiscutables, mais sur le simple fondement du principe de cohérence des bases philosophiques de la métaphysique catholique de la sexualité (qui sont en elles-mêmes contestables, eu égard à l'évolution de l'histoire des idées), l'Eglise maintient un discours, qui certes, dans nos pays occidentaux, n'a qu'une force essentiellement in foro interno (du point de vue de la loi), mais qui enjoint aux homosexuels de renoncer à toute vie sexuelle, donne une connotation (qui en terme d'injonction sociale n'est pas négligeable) négative aux actes de ceux qui passent outre, et a des effets politiques parfois conséquents, comme on a pu le voir cette année. Ce qui a mon sens pôse véritablement problème.

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    1. Toujours impressionné de voir ceux-là mêmes qui nous reprochent une approche trop "naturaliste" de la sexualité voient dans l'homosexualité la seule tendance qui serait totalement indépassable, purement innée (et bien entendu pas le produit d'expériences) au point que critiquer cette pratique serait porter atteinte à leur être.

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    2. Je donnerais bien des exemples d'autres tendances sexuelles
      - "subies et non choisies"
      - qui ne sont pas pour autant "bonnes" pour la personne.

      L'ennui, c'est que vous allez injecter de la moraline là-dedans et on va atteindre le point Godwin.

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    3. "Toujours impressionné de voir ceux-là mêmes qui nous reprochent une approche trop "naturaliste" de la sexualité voient dans l'homosexualité la seule tendance qui serait totalement indépassable, purement innée (et bien entendu pas le produit d'expériences) au point que critiquer cette pratique serait porter atteinte à leur être."

      Tu as vu ça où?

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    4. C'est le fond de votre argument pour la reconnaissance de l'homosexualité : "ils sont comme ça par nature, ils n'ont pas le choix donc il faut reconnaître cet état comme ayant une dignité égale.."

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    5. Incarnare : je ne me risquerais pas à donner une proportion de qui pense quoi, mais en tout cas, je suis certaine que la défense de l'égale dignité entre relation homosexuelle et relation hétérosexuelle ne passe pas nécessairement et chez tous par le "ils sont comme ça par nature...". Personnellement, je me contrefiche que ce soit "naturel" ou non (la distinction entre naturel et culturel, inné et acquis, dans le champ des comportements humains, me semble en fait assez spécieuse). En revanche, que ce soit bon pour les personnes concernées m'intéresse.
      il existe des tendances "subies et non choisies, et mauvaises pour la personne", oui. on n'a pas réussi à me prouver que c'était le cas de l'homosexualité en elle-même. mais que des relations homosexuelles soient mauvaises pour la personne, oui, comme des relations hétérosexuelles peuvent l'être ; pour revenir au témoignage d'Audrey que vous avez cité précédemment, les relations homosexuelles qu'elle a vécues étaient manifestement mauvaises pour elles ; si on se place sur le plan du témoignage, je peux vous citer plein d'exemples de relations hétérosexuelles aussi destructrices. Or, je me demande quelle capacité nous avons de dépasser les témoignages individuels, ou de considérer tel témoignage plus valide qu'un autre, ou plus susceptible de passer du stade de témoignage au stade de vérité pour le genre humain, de "réel" là où le témoignage inverse serait erroné, ou mensonger, ou fondé sur une blessure inassumée etc.
      je trouve que dans les débats récents, on a un peu trop souvent oublié qu'on parlait de "vrais gens" et que les écouter dans leur diversité était fondamental. La variété des récits est le signe que chaque relation est unique, parce que chaque individu est unique.

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